De la même manière que notre groupe avait soutenu l'avènement d'une loi-cadre pour accompagner le mouvement de restitution des biens culturels spoliés lors des persécutions antisémites, nous nous satisfaisons de voir advenir un cadre général pour la restitution des restes humains présents dans les collections publiques. Nous saluons notre collègue Catherine Morin-Desailly pour son engagement, qui a permis l'adoption de cette proposition de loi transpartisane au Sénat.
Ce texte vise d'abord à garantir le respect de la dignité humaine en nous assurant que les restes humains feront l'objet de rites funéraires correspondant à leur culture d'origine. Leur collecte s'est souvent faite dans des conditions intolérables : captation patrimoniale dans le cadre du système colonial ; constitution en trophée de guerre ; vol, pillage ou profanation de sépultures. Leur présence au sein des collections publiques ne suffit pas à en faire des biens culturels comme les autres ; ils ne peuvent être perçus et traités comme de simples objets.
L'épisode de la restitution des têtes maories à la Nouvelle-Zélande en 2012 a illustré le caractère parfois sordide de la présence de ces restes humains dans nos collections. Certains ont été prélevés en toute illégalité à l'étranger, à des fins de recherche et de documentation scientifique. Questionner leur origine et engager un travail de restitution aux pays concernés est un élément essentiel du travail de mémoire, de justice et de réparation auquel nous sommes tous attachés. C'est aussi une façon de construire des relations internationales de confiance et de respect. C'est un devoir qui est à la fois éthique et diplomatique.
Plutôt que de ne pas répondre aux demandes formulées ou d'engager des procédures détournées, il convenait d'adopter une loi-cadre, afin d'accompagner ce mouvement de restitution dans des conditions transparentes. Notre groupe se satisfait donc de ce texte équilibré.
Le texte ne dit pas ce qui se passera en cas de refus de restitution. Un recours sera-t-il possible ? Nous proposerons, afin de garantir la transparence de la procédure, que les rapports et avis sur les demandes de restitution soient systématiquement publiés. Nous regrettons également que le texte se limite aux demandes formulées par les pays étrangers et qu'il fasse l'impasse sur les restes humains ultramarins. Nous déplorons que ce problème, qui a bien été identifié par les sénateurs, ne fasse l'objet que d'une demande de rapport, et non d'une procédure ad hoc. Enfin, il importe d'accentuer l'effort de recherche sur la provenance de ces restes humains, ce qui implique des moyens financiers et humains supplémentaires.