La France a perdu 650 000 têtes de bétail en quatre ans ; 24 % des éleveurs ont jeté le gant au cours des dernières décennies. C'est l'enjeu majeur pour la souveraineté et l'équilibre agroécologique de notre pays. Tout le reste est littérature. Si on ne sauve pas l'élevage, notre modèle agricole et ses vertus sont perdus. Pour y parvenir, il faut un rééquilibrage des prix, mais aussi traverser la crise présente, caractérisée par une hausse du coût des matières premières qui n'est pas répercutée dans la transformation et la distribution. Dans ce contexte, n'aurait-il pas été judicieux de provoquer un nouveau cycle de négociations, pour ne pas accélérer la catastrophe annoncée ? Le désespoir s'installe chez les éleveurs.
Le Président de la République a annoncé un système de portage du foncier, mais il faut aussi un partage du foncier, sans quoi il n'y aura ni transmission, ni transition. Sans installation, pas d'agroécologie, pas d'avenir pour notre agriculture. C'est le dérèglement de la concentration du foncier qui est le principal obstacle, non la question du portage.
En ce qui concerne le revenu, s'il y a une loi EGALIM 3, il faudra entrer dans le dur, c'est-à-dire dans le rapport de force de ce que vous avez très justement appelé le jeu d'acteurs. Il s'agit de renforcer les associations et organisations de producteurs et la capacité de gérer volumes et prix, et de mettre à mal le phénomène quasi oligarchique de concentration de l'achat, de la production et de la distribution.
S'agissant des phytosanitaires, nous avons vécu un mandat de « faux plat ». Êtes-vous prêt à réactiver le processus d'affranchissement progressif de la chimie promis par les États généraux de l'alimentation – une sortie par le haut, proposant de nouvelles solutions ? Cela suppose de relancer le plan Écophyto au bon niveau, y compris la phase de concertation avec toutes les parties prenantes.
Sur la précarité, je me réjouis que vous ne confondiez pas la fin et les moyens. Le chèque alimentaire n'est pas la solution, mais la précarité est un vrai problème. J'aime votre idée de reprendre le faisceau des possibles pour répondre à la question de l'alimentation santé pour tous.
Concernant l'eau, l'enjeu capital est la gouvernance ; tout le reste, ce ne sont que des bonnes intentions. Qui va arbitrer entre les différents usages de l'eau et dans quel périmètre ? À cette question, vous n'avez pas répondu ; j'attends votre réponse.