Plus de 1 000 hommes ont été déployés pour renforcer le flanc est de l'Otan, en Roumanie pour la mission Aigle et en Estonie pour la mission Lynx. Quand le Parlement en a-t-il été informé officiellement ? Quand le Parlement a-t-il autorisé ces interventions au-delà de quatre mois ? Jamais !
Pourtant, l'article 35 de notre Constitution est très clair : « Le Gouvernement informe le Parlement de sa décision de faire intervenir les forces armées à l'étranger, au plus tard trois jours après le début de l'intervention. […] Lorsque la durée de l'intervention excède quatre mois, le Gouvernement soumet sa prolongation à l'autorisation du Parlement. »
Comment ce véritable scandale démocratique est-il possible ? Par une entourloupe qui consiste à qualifier ces missions non d'opérations extérieures, mais de missions opérationnelles (Missops). Comment ? Pourquoi ? Qui l'a décidé ? Quelle autorisation le Parlement a-t-il donnée ? On ne le sait pas.
Ce n'est pas seulement un tour de passe-passe, c'est une évolution bien plus structurelle : le changement de doctrine, résumé par le remplacement du triptyque « paix-crise-guerre » par celui « compétition-contestation-affrontement », a des conséquences démocratiques, politiques et budgétaires. Il s'agit d'une remise en cause des concepts mêmes de guerre et de paix ; pire, c'est un abandon de l'objectif de la paix.
La guerre avant la guerre vous permet de contourner le Parlement car il n'est saisi que sur la guerre. Si vous évitez un vote, vous violez surtout de manière sournoise la Constitution : plus de guerre officielle, plus de vote au Parlement – et tant pis pour la Constitution !