L'agriculture française fait face à deux défis majeurs : la falaise démographique et le mur climatique. Le phénomène le plus grave est la décapitalisation massive de l'élevage. Depuis des décennies, notre cheptel perd des centaines de milliers de têtes de bétail et nous serons tout juste autosuffisants en matière de production laitière au cours des dix prochaines années. Pour le pays du labour et du pâturage, ces évolutions sont un drame et font craindre l'échec du virage agroécologique.
Car tout se tient : tant qu'il sera plus facile d'agrandir les exploitations agricoles, grâce au laxisme de la régulation foncière, notre pays sera tenté par la céréalisation, soit une perte de valeur ajoutée sur le plan social et économique, mais aussi pour l'emploi et bien sûr pour l'écologie – qui est pourtant l'assurance vie de l'agriculture.
Nous devons examiner le budget de l'agriculture pour 2024 conscients que tout se tient et que nous devons relever les défis de l'agroécologie, de la relève générationnelle et de la défense de polyculture-élevage, et l'examiner avec objectivité. Nous saluons donc tout d'abord la hausse de 17 % de ses crédits, une hausse que M. le rapporteur pour avis a eu raison de qualifier d'historique, ainsi que la qualité du dialogue avec le ministère de l'agriculture, au-delà des différences d'opinions et d'analyses. Que notre collègue Pascal Lecamp ne s'inquiète pas, le ton de nos échanges sera courtois et constructif, comme toujours !
Ce budget nous laisse néanmoins dubitatifs et nous inspire de vives critiques, l'augmentation quantitative ne se traduisant malheureusement pas sur le plan qualitatif. La régulation du foncier, qui part à la dérive, constitue un angle mort de ce PLF qui ne prévoit aucun mécanisme de contrôle minimum, ce qui était pourtant possible sans attendre le projet de pacte et de loi d'orientation et d'avenir agricoles. Dans un souci de débat démocratique et de clarté, nous aurions pu ouvrir la boîte noire des fonds en faveur de la souveraineté et de l'agroécologie – la discussion nous permettra, je l'espère, de le faire : ces fonds ne sont pas fléchés et nous aimerions connaître vos intentions.
Bien que le sujet soit quelque peu éloigné du débat, je regrette par ailleurs l'accord intervenu sur l'effacement du gazole non routier (GNR).