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Intervention de Mereana Reid Arbelot

Séance en hémicycle du jeudi 2 novembre 2023 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2024 — Justice

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMereana Reid Arbelot :

J'ai l'honneur d'exposer la position du groupe Gauche démocrate et républicaine – NUPES sur les crédits de la mission "Justice" . Nous saluons l'augmentation de 503 millions pour l'année 2024, ainsi que les actions entreprises en faveur des outre-mer, puisque le PLF intègre plusieurs mesures visant à adapter l'institution judiciaire aux spécificités des territoires ultramarins. Malgré ces initiatives, force est de constater que globalement, ce projet de loi n'apporte pas de réponse adéquate pour remédier à la détérioration du système judiciaire.

Du seul point de vue budgétaire, l'augmentation des crédits alloués à la justice se révèle insuffisante. Les crédits ne progresseront que de 5,3 % pour 2024, alors même qu'il est prévu 3 % d'inflation annuelle. Il est encore plus significatif que le budget consacré à la justice demeure parmi les moins élevés d'Europe. Selon une étude menée par le Conseil de l'Europe, les délais de jugement en France sont presque trois fois plus longs que dans les pays voisins. Le rapport du comité des états généraux de la justice dénonce quant à lui une « crise du service public de la justice » et insiste sur la nécessité d'une réforme systémique de l'institution judiciaire – à laquelle le ministère se refuse. À bien des égards, le projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice et le projet de loi organique relative à l'ouverture, la modernisation et la responsabilité du corps judiciaire, adoptés cet été, ont été source de déception. Les états généraux de la justice ont déploré une politique judiciaire qui ne faisait que « colmater les brèches » d'un système défaillant.

La mission Justice du PLF pour 2024 manque une nouvelle occasion de s'attaquer aux problèmes structurels qui affectent le système judiciaire. Il est regrettable que le budget de l'administration pénitentiaire demeure le premier poste de dépenses de la justice. Symboliquement, cela traduit une approche davantage tournée vers la répression que vers la réintégration dans la société. De plus, cette stratégie répressive s'est révélée peu efficace dans la prévention de la récidive.

Le système pénitentiaire est également affecté par un phénomène de surpopulation, comme en témoigne le taux d'occupation moyen des maisons d'arrêt, qui avoisine les 142 %. Alors que la capacité pénitentiaire a augmenté au cours des dernières décennies, les enquêtes menées par le Comité européen pour la prévention de la torture révèlent que la pression carcérale ne faiblit pas. Puisque l'extension du parc carcéral ne résout pas le problème de la surpopulation, le groupe GDR – NUPES souhaite la création d'un mécanisme national contraignant de régulation carcérale et le développement des peines alternatives. À cet égard, le rapport d'information publié en juillet dernier par nos collègues Elsa Faucillon et Caroline Abadie formule des propositions susceptibles de tous nous rassembler, afin de mettre un terme à la surpopulation carcérale.

S'agissant du programme Justice judiciaire, le Gouvernement a instauré diverses mesures, que nous saluons : une revalorisation statutaire et indemnitaire pour les personnels de surveillance et les greffiers ; l'alignement du traitement des juges judiciaires sur celui des juges administratifs ; la titularisation de certains contractuels. Après des mois d'une mobilisation inédite des greffiers, un protocole d'accord a été signé le 26 octobre ; il constitue un pas important pour la reconnaissance de la profession. Toutefois, l'évolution de leur statut reste à parfaire. Le Gouvernement a également opté pour la contractualisation des personnels de surveillance et des attachés de justice, ce qui soulève de nombreux problèmes. Au lieu d'envisager les contractuels comme un vivier de recrutement, il conviendrait plutôt de s'interroger sur les facteurs expliquant ce manque d'attractivité. Il y va de la pérennité de la justice.

Le Gouvernement entend créer une équipe autour du magistrat. Cette idée est intéressante, mais le flou qui entoure le nouveau statut juridique des attachés de justice constitue une véritable source d'inquiétude. Comment garantir que cette nouvelle désignation ne soit pas une simple façade visant à dissimuler le manque de réponses concrètes obtenues par les trois précédents statuts – les assistants de justice, les juristes assistants et les assistants spécialisés ? De plus, ce statut juridique place les attachés de justice dans une situation précaire, puisque leur titularisation n'est en rien assurée. En tout état de cause, l'attaché de justice ne devrait pas être transformé en une sorte de sous-magistrat chargé de combler le manque de juges au sein des juridictions.

Pour toutes ces raisons, le groupe GDR – NUPES est défavorable au texte ; la majorité des membres du groupe votera contre.

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