Le constat n'est pas moins inquiétant s'agissant des greffiers.
Le justiciable est naturellement la victime collatérale de cet abandon : le recours à la justice est devenu un véritable parcours du combattant. Les délais s'allongent ; les requérants ne sont plus écoutés ; les juges des enfants sont condamnés à renouveler des mesures de suivi éducatif sans jamais voir les familles, faute de temps pour les recevoir ; les juges correctionnels doivent choisir entre siéger tardivement – c'est un euphémisme – ou renvoyer l'audience, ce qui peut la repousser à l'année suivante.
Le tout se produit sur fond de surpopulation carcérale, avec un taux d'occupation moyen des maisons d'arrêt de 146 %. Cela contraint les détenus à cohabiter parfois à plus de trois au sein d'une même cellule. Plus de 2 500 personnes doivent dormir chaque nuit sur des matelas à même le sol, dans des cellules infestées de rats, de puces et de cafards, où les sanitaires ne sont pas séparés du reste de la pièce et où la notion d'intimité n'existe pas. La moisissure, le froid, l'absence de lumière : de telles conditions d'insalubrité sont indignes et privent les détenus de possibilités réelles de réinsertion.
Après la « tribune des 3 000 » et les états généraux de la justice, les grands chantiers ont été identifiés. Le budget 2024 ne rattrape toutefois pas trente ans d'abandon.
Les moyens augmentent : c'est incontestablement une bonne nouvelle – mais cela ne suffira pas à enrayer la maltraitance des personnels, des justiciables et des détenus.
S'agissant du programme Justice judiciaire, les recrutements annoncés ne permettront pas de diviser par deux les délais comme vous le prétendez, monsieur le ministre,…