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Intervention de Sarah Tanzilli

Séance en hémicycle du jeudi 2 novembre 2023 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2024 — Justice

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSarah Tanzilli, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

C'est avec plaisir que je présente devant vous, pour la deuxième année consécutive, un budget de la justice et de l'accès au droit en forte hausse. Il est la traduction concrète de nos engagements devant les acteurs du monde de la justice pendant les états généraux, mais aussi devant les Français, il y a quelques semaines, lors de l'adoption définitive de la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027.

Après une augmentation de 8 % en 2023, nous prévoyons une hausse de plus de 5 % en 2024 des crédits consacrés au fonctionnement de la justice et à l'accès au droit, ce qui les conduira à dépasser pour la première fois la barre symbolique des 6 milliards d'euros. Ces moyens supplémentaires permettront à l'institution judiciaire d'atteindre ses objectifs prioritaires : la réduction des délais d'audiencement et des stocks d'affaires en attente, l'amélioration des conditions de travail des agents et un meilleur accompagnement des justiciables.

Le programme 166, Justice judiciaire, fait l'objet d'une nouvelle hausse soutenue de ses crédits, de près de 10 %, qui correspond au financement des recrutements de personnel tant attendus par l'institution. Au total, près de 1 300 emplois supplémentaires sont programmés pour 2024 : 305 postes de magistrats, 340 greffiers et 513 professionnels destinés à former de véritables équipes autour des magistrats. Les mesures de revalorisation salariale engagées en 2023 sont par ailleurs maintenues et connaîtront leur première année pleine en 2024, avec une enveloppe catégorielle de 120 millions d'euros. Enfin, un effort budgétaire important est consenti pour resserrer le maillage territorial des maisons de justice et du droit, grâce à une hausse de plus de 9 % des crédits, et pour soutenir les associations d'aides aux victimes, dont l'enveloppe bénéficie d'une hausse de 4 %.

L'arrivée massive de nouveaux agents nous impose de redimensionner notre immobilier judiciaire et de veiller à la fiabilité et au bon dimensionnement de nos outils numériques. En la matière, un constat s'impose d'emblée : les moyens budgétaires qui leur sont consacrés présentent une trajectoire ambitieuse, avec une augmentation de 35 % des crédits de paiement de l'action 06 du programme 166. Cette hausse permettra de financer des rénovations et des extensions, ainsi qu'un nouveau plan de transformation numérique très attendu.

Notre immobilier judiciaire fait face à deux contraintes majeures : d'ordre symbolique, tout d'abord, du fait de la nécessité d'incarner la solennité de l'institution judiciaire ; une contrainte de volume, ensuite, en raison de l'accueil de nouvelles recrues. Plusieurs mécanismes sont déjà appliqués pour maximiser les espaces : la densification, le partage de bureaux ou la réserve foncière ou immobilière. Malgré tout, de façon temporaire, des prises à bail seront inévitables.

Il faut prendre en compte le principe de mutabilité des services publics dans le cadre de la programmation immobilière, afin de ne pas s'engager dans des opérations inadaptables à l'avenir. En outre, la gouvernance de l'immobilier judiciaire apparaît complexe et peu lisible pour les acteurs de terrain. Les mécanismes de déconcentration de la décision et des moyens au niveau régional et local, tels qu'institués par le garde des sceaux, sont donc les bienvenus. Enfin, il faut désormais prendre pleinement en considération les besoins des autres usagers de l'institution, les avocats et justiciables – particulièrement les victimes.

Ce fut le cas lors de la construction de la salle dite des grands procès qui, aménagée provisoirement pour accueillir le procès des attentats du 13 novembre, ne désemplit pas depuis. Il convient donc, pour la remplacer, de réfléchir à l'aménagement une grande salle d'audience pérenne, permettant d'accueillir des contentieux de masse, et qui, tout en symbolisant l'institution, assurerait à la fois la sécurité maximale et la prise en compte des besoins spécifiques des victimes.

S'agissant de la numérisation de l'institution judiciaire, je me réjouis du succès du premier plan de transformation numérique qui a permis aux personnels de disposer de matériels en quantité suffisante, adaptés à leurs besoins. Le second plan de transformation portera principalement sur le développement et le renforcement des applicatifs métiers. N'ayons pas peur de l'affirmer : le personnel peut être en souffrance face à des logiciels peu fiables, sous-dimensionnés et parfois peu ergonomiques. Ce plan de transformation est donc une impérieuse nécessité : il serait incompréhensible de consacrer des moyens au recrutement d'agents supplémentaires pour qu'ils dépensent leur énergie à trouver des solutions afin de faire fonctionner des outils numériques inadaptés. À l'avenir, il serait peut-être préférable d'installer des applications moins ambitieuses, mais plus fiables. Enfin, je salue l'internalisation partielle des capacités numériques et le recrutement de personnel technique, en cours de déploiement dans chaque juridiction.

Cette année encore, le budget de la justice est marqué par le respect : le respect de nos agents qui œuvrent chaque jour en faveur d'une justice utile et efficace, le respect des justiciables qui attendent – à juste titre – une justice plus rapide et plus à l'écoute et, surtout, le respect de la parole donnée à l'occasion des états généraux de la justice et de la loi d'orientation et de programmation. Nous pouvons en être fiers.

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