La semaine dernière, la commission des lois a émis un avis favorable sur les crédits de l'administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse pour 2024. Pour la septième année consécutive, les budgets de ces programmes sont en hausse, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter. J'en profite d'ailleurs pour saluer votre action, monsieur le garde des sceaux : vous avez amplement contribué à la pérennisation des hausses budgétaires et au soutien de ces deux administrations essentielles de la justice.
Je ne détaillerai pas l'évolution des moyens action par action ; je vous renvoie pour cela à mon rapport et à celui de M. le rapporteur spécial. Retenons surtout qu'en 2024 l'accent sera mis sur les dépenses de personnel : elles connaissent une hausse de près de 4 % dans le programme 182, Protection judiciaire de la jeunesse, et une hausse de 5 % dans le programme 107, Administration pénitentiaire. Ces hausses permettront de poursuivre les recrutements et de créer 447 emplois dans l'administration pénitentiaire et 92 dans la protection judiciaire de la jeunesse, la PJJ. Elles permettront également l'application de nombreuses mesures catégorielles, notamment le passage du corps des surveillants pénitentiaires de la catégorie C à la catégorie B. Cette réforme est très attendue par les acteurs et les actrices de terrain que j'ai rencontrés.
Dans la continuité de la charte du surveillant acteur – « Principes du surveillant pénitentiaire, acteur incontournable d'une détention sécurisée » – que vous avez signée en 2021, monsieur le garde des sceaux, le passage de cette profession en catégorie B confirmera l'évolution de ses missions, nous permettant ainsi de reconnaître pleinement le rôle essentiel des personnels de surveillance. Je l'ai dit en commission et je le redis à cette tribune : il s'agit d'une réforme historique, dont nous devons saluer l'importance et la pertinence. La troisième force de sécurité du pays que constitue l'administration pénitentiaire mérite toute notre reconnaissance. Avec cette réforme, nous sommes à la hauteur de l'engagement dont font preuve au quotidien ses personnels dans leurs missions complexes et essentielles.
Pour répondre par avance aux critiques qui ne manqueront pas de venir de certains bancs et à celles que le rapporteur spécial a déjà formulées, permettez-moi d'apporter quelques explications sur les crédits hors titre 2, c'est-à-dire hors dépenses de personnel. Ces crédits connaissent certes une diminution, mais elle s'explique par l'effet mécanique du ralentissement des décaissements dans le cadre du programme immobilier pénitentiaire. Après une année 2023 riche en livraisons de nouveaux établissements, l'année 2024 sera une année intermédiaire marquée par le lancement des grandes opérations de la seconde phase du plan « 15 000 ». Ces opérations seront donc bien engagées, mais conduiront plus tardivement aux décaissements. C'est en raison du rythme des travaux que ces dépenses ne sont pas prévues en crédits de paiement dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2024.
Je vous rassure donc, chers collègues : il ne s'agit nullement d'un recul en matière d'immobilier pénitentiaire. Au contraire, là encore, les efforts consentis s'inscrivent pleinement dans la continuité des budgets précédents. Le plan « 15 000 » continue son chemin : à la fin de l'année, nous aurons créé le tiers des nouvelles places de prison prévues ; fin 2024, près de la moitié des nouveaux établissements pénitentiaires programmés auront été construits. Nous demeurons pleinement mobilisés et je sais que nous pouvons compter sur votre engagement, monsieur le ministre, pour atteindre les objectifs que nous nous sommes collectivement fixés.
Avant de conclure, permettez-moi d'ouvrir des pistes en évoquant un sujet sur lequel je me suis penché au cours des dernières semaines et qui mérite, je crois, de retenir l'attention de notre assemblée. Publiée en début d'année, une étude épidémiologique nationale sur la santé mentale a confirmé le constat empirique des professionnels de santé et des personnels pénitentiaires, qui ne cessent de nous alerter à ce sujet : en prison, la prévalence des troubles psychiatriques est bien plus importante que dans la population générale. Selon cette nouvelle étude, les deux tiers des hommes et les trois quarts des femmes détenus en maison d'arrêt présentent, à la sortie de prison, un trouble psychiatrique ou lié à la consommation de substances.
L'année 2024 marquera le lancement de la deuxième phase de construction des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) : c'est sans doute une partie de la réponse à cette problématique, mais nous devons nous en saisir et envisager, le cas échéant, des évolutions normatives ou organisationnelles. Comme le disait si bien Simone Veil lors de la création des centres médico-psychologiques (CMP) en maisons d'arrêt : « Les prisons doivent servir à amender les détenus et pas seulement à les punir. »
Je souligne, pour finir, l'importance de l'accompagnement psychologique des personnels pénitentiaires : étant donné la complexité de leurs missions, je ne les oublie pas.