Je voudrais d'abord revenir sur une expression que vous avez prononcée : « battre la mesure ». Avant de battre la mesure, il faut écrire la partition. L'implication des différents ministères soulève des difficultés, notamment pour la mise en œuvre de l'agriculture durable, avec ses trois pieds : le social, l'économique et l'environnemental. Il semble que l'aspect économique prenne souvent le dessus sur les autres. Avez-vous le sentiment qu'il existe un cadre contraignant qui nous oblige à répondre aux exigences économiques, en particulier dans le domaine agricole, et que cette contrainte influe sur la mise en œuvre des plans ?
Ensuite, pour battre la mesure, il faut être le chef d'orchestre. Jusqu'où peut-on aller dans ce rôle ? En effet, l'application qui est faite de la réglementation européenne sur l'utilisation des pesticides peut différer en fonction de la géographie, notamment entre le Nord et le Sud. Cela pose la question d'une forme de distorsion de concurrence. Par exemple, nos agriculteurs auraient la possibilité d'acheter des produits phytopharmaceutiques interdits en France dans d'autres pays de l'Union européenne où ils seraient autorisés. Nous enquêtons sur ce point, pour vérifier si c'est une réalité ou une perception erronée.
Vous évoquez la possibilité d'une variabilité régionale dans la mise en œuvre des politiques, avec des applications différentes d'une région à l'autre. Cela peut se comprendre, étant donné que les conditions peuvent varier. Cependant, cela soulève le problème d'une application des règles à géométrie variable selon les endroits – problème que nous voyons déjà, par exemple, pour les aides allouées aux jeunes agriculteurs, qui peuvent être très différentes à un kilomètre de distance. En tant que chef d'orchestre, comment verriez-vous cet enjeu de l'harmonisation des politiques ? Opteriez-vous pour une application plus fine au niveau régional plutôt que pour une application nationale uniforme ?
Enfin, des chercheurs de l'Inrae nous disent que la réduction de l'utilisation des pesticides nécessite des moyens financiers. Cependant, ces moyens financiers semblent actuellement insuffisants pour passer au niveau supérieur. Quel regard portez-vous sur le niveau global des financements alloués ?