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Intervention de Thomas Cazenave

Séance en hémicycle du jeudi 2 novembre 2023 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2024 — Investir pour la france de 2030 ; plan de relance

Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics :

Je suis heureux de pouvoir discuter avec vous ce matin sur les missions Investir pour la France de 2030 et Plan de relance, deux missions exemplaires du cap que le Gouvernement s'est fixé depuis 2017 et qui sous-tend l'ensemble du projet de loi de finances pour 2024 : investir pour l'avenir, réindustrialiser le pays et accélérer la transition écologique.

La crise du covid a fait peser sur notre économie comme sur celles de l'ensemble de nos partenaires un risque inédit. Nous nous en sommes aussi servis comme d'un levier de renforcement structurel de notre économie. Le plan France relance est venu compléter en septembre 2020 les mesures d'urgence prises dès le mois de mars avec un double objectif : permettre une reprise forte et durable de l'activité ; apporter une réponse aux défis structurels de l'économie française que sont la transition écologique, la compétitivité de nos entreprises et le développement des compétences et de la cohésion territoriale.

Alors que la mission "Plan de relance" arrive à son terme, nous pouvons collectivement nous accorder sur le fait qu'elle a été à la hauteur de l'enjeu. D'abord, elle a été massive : ce sont 100 milliards d'euros qui auront été investis, dont 40 milliards donneront lieu à un versement par l'Union européenne. Ensuite, elle a été rapide : à ce stade, le taux d'engagement est de 99 %.

Elle a bien été exceptionnelle et temporaire : le PLF pour 2024 prévoit l'ouverture de 1,4 milliard d'euros de crédits de paiement contre 4,4 milliards l'an dernier, uniquement pour couvrir les décaissements associés aux engagements déjà réalisés ou qui doivent encore l'être d'ici à la fin de l'année 2023. Aucun engagement nouveau n'est prévu. Elle a soutenu des priorités indéniables : la rénovation énergétique des bâtiments, les infrastructures et les mobilités vertes, la biodiversité, la transition du modèle agricole, les énergies et technologies vertes ou encore la décarbonation de l'industrie.

En outre, elle a produit les effets escomptés, et je vous le dis d'autant plus sûrement que nous nous sommes mis en situation de l'évaluer grâce à un comité dédié. Dans l'attente du rapport qui paraîtra en décembre, je vous rappelle les conclusions de la précédente évaluation, datée de décembre 2022 : l'économie française a retrouvé dès l'été 2022 son niveau de PIB d'avant la crise, devançant la plupart de nos partenaires, notamment l'Allemagne et le Royaume-Uni ; l'emploi total, au troisième trimestre 2022, était supérieur de 3,4 % à son niveau du quatrième trimestre 2019 ; le pouvoir d'achat par habitant est resté orienté plus favorablement en France en 2022 ; enfin, l'activité des PME a redémarré et a dépassé son niveau d'avant la crise.

Toutefois, nous sommes lucides, les défis pour notre économie restent considérables. Ces défis, nous en avons constaté l'ampleur, l'an dernier, avec l'invasion de l'Ukraine et ses conséquences sur les prix des intrants, à commencer par l'énergie, et les tensions sur les chaînes de valeur mondiales. Nous devons également faire face à la très forte accélération technologique en cours dans le monde, notamment aux États-Unis mais aussi en Chine.

Enfin, nous sortons à une vitesse accélérée de l'ère de l'argent gratuit, ce qui induit le risque de mettre en difficulté une génération d'entreprises technologiques prometteuses, et pour certaines stratégiques, que nous avons soutenues depuis la phase du laboratoire.

Le plan France 2030 vient non seulement prolonger et amplifier l'effort du plan de relance pour préparer l'avenir mais aussi apporter une réponse à ces défis nouveaux.

Il se traduit par une action massive puisque 54 milliards d'euros sont investis sur cinq ans, soit cinq fois plus que les deuxième et troisième PIA. En deux ans, 25 milliards ont été engagés, soit déjà plus que les montants cumulés des deux premiers PIA.

Nous ne raisonnons pas qu'en termes de montants et avons privilégié une méthode de ciblage équilibrée en associant une action dirigée vers les secteurs et acteurs sélectionnés selon les priorités définies par l'État, sans saupoudrage, et une logique d'appels à projets, destinée à laisser tout son champ à la créativité, à l'initiative et à l'esprit d'innovation. Au total, les projets soutenus pour le moment permettront de générer 2 000 dépôts de brevets et de créer 40 000 emplois.

J'entends les critiques formulées par le rapporteur spécial sur le ciblage du plan : trop faible nombre de cibles, soutien excessif aux start-up ou encore trop grand nombre d'entreprises parmi les bénéficiaires. Permettez-moi de rappeler ici quelques faits et chiffres. Nous sommes, je vous l'accorde, sortis de la logique de la relance au profit d'un plan de transformation plus ciblé. Toutefois, nous avons déjà soutenu plus de 2 900 projets pour près de 4 500 bénéficiaires, dont 3 200 structures uniques. Les acteurs émergents, en particulier les start-up, ont bénéficié de 29 % des aides. En effet, nous croyons au potentiel de valorisation de notre recherche publique, l'une des meilleures au monde, mais aussi aux impacts positifs sur l'emploi du développement de nos start-up. Pensons à Verkor, deuxième licorne industrielle française, qui s'apprête à créer une gigafactory – une usine de très grande taille – de batteries à Dunkerque. Il n'y en a pas non plus que pour les entreprises puisque les universités et les organismes de recherche ont bénéficié de 32 % des montants.

Ce plan est aussi un plan de transformation écologique. Ses cibles globales le montrent : 50 % des crédits iront à des projets bas-carbone ou de décarbonation, avec zéro dépenses nuisibles à l'environnement. Cela se traduit aussi dans les conditions de sélection que nous appliquons : tous les projets sont évalués à l'aune de critères exigeants, portant notamment sur l'innovation, les effets d'entraînement territoriaux, les emplois créés, l'impact environnemental et la décarbonation ou encore les usages qui seront faits des technologies. Cette caractéristique se manifeste également dans ses réalisations concrètes. Ainsi la France produira-t-elle 300 000 véhicules électriques en 2023 et 1,5 million dès 2026, notre objectif étant d'atteindre 2 millions de véhicules électriques par an à horizon 2030. S'agissant de l'hydrogène, nous avons sécurisé la production de 2,5 gigawatts par an d'ici à 2027 dans l'objectif d'installer 6,5 gigawatts d'ici à 2030. Enfin, pour la décarbonation des grands sites industriels, les feuilles de route seront très bientôt toutes signées, dans une logique de donnant-donnant.

Par ailleurs, je précise, ce qui me permettra de répondre à certaines observations, qu'il importe de garder à l'esprit que le plan France 2030 n'a pas vocation à répondre seul à tous les enjeux auquel le pays est confronté. Le plan s'inscrit dans une politique bien plus large, cohérente et dont la stabilité dans le temps vaut à la France d'être depuis plusieurs années déjà le pays le plus attractif d'Europe.

Citons d'abord les mesures destinées à soutenir la compétitivité. L'impôt sur les sociétés a été ramené de 33 % à 25 % et nous poursuivons la baisse des impôts de production. Dans le cadre de ce projet de loi de finances pour 2024, nous allons plus loin encore en créant le crédit d'impôt au titre des investissements en faveur de l'industrie verte qui nous permettra de soutenir la production des technologies stratégiques pour notre transition écologique tout en restant compétitifs face aux États-Unis et à la Chine.

Nous avons également mis en œuvre un ambitieux programme de simplification des règles susceptibles d'entraver les projets d'avenir. C'est un point tout aussi important que les financements publics pour nos entreprises. Je parle ici bien sûr de la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, de la loi d'accélération et de simplification de l'action publique, dite loi Asap, de la loi relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, dite loi ENR, ou encore de la loi relative à l'industrie verte. Grâce à cette dernière, nous diviserons par deux les délais d'ouverture ou d'agrandissement d'une usine en France, les faisant passer de dix-sept mois à neuf mois réels.

Pour ce qui est de la transition écologique, là encore, nos actions vont au-delà du plan France 2030, qu'il s'agisse du plan d'action pour une gestion résiliente et concertée de l'eau lancé cet été, des dispositifs que nous avons soutenus et obtenus au niveau européen, par exemple le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF), véritable taxe carbone aux frontières qui s'appliquera notamment à l'acier et l'aluminium servant à la production des véhicules électriques, ou encore de l'approche globale du plan national de transition écologique, pour la mise en œuvre duquel la Première ministre a annoncé en juillet une hausse de 10 milliards d'euros du budget de l'État pour 2024.

Cette politique porte ses fruits et nous la poursuivrons. Pour ne citer qu'un chiffre, rappelons que nous avons créé plus de 110 000 emplois industriels nets depuis 2017 après des années de désindustrialisation.

Notre objectif est clair : préparer notre avenir, renforcer nos atouts, réduire nos faiblesses, donner de la visibilité aux porteurs de projets et choisir le meilleur. Parce que nous faisons le choix de la responsabilité budgétaire mais aussi de l'excellence, le plan France 2030 est un programme sélectif et le restera mais il faut rappeler que c'est résolument un programme accessible à tous nos acteurs économiques, en particulier les plus petits.

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