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Intervention de Sophia Chikirou

Réunion du mercredi 18 octobre 2023 à 13h30
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSophia Chikirou :

Je crois que le rapporteur Manuel Bompard a fait preuve d'une grande lucidité et je partage intégralement son analyse, notamment lorsqu'il parle de la tenaille dans laquelle notre pays est pris. Je rappelle que nous sommes le deuxième contributeur net au budget de l'Union, ce qui s'entend par notre démographie, mais nous sommes surtout parmi les bons derniers concernant le taux de retour sur l'ensemble des politiques européennes, alors que dans le même temps, le paradis fiscal luxembourgeois est le premier bénéficiaire par habitant.

Ce qui est inquiétant est que notre contribution est amenée à s'accroître dans les années à venir. Cela visera à financer l'inflation, l'augmentation des taux d'intérêt, le soutien apporté à l'Ukraine, mais cela s'explique aussi par un dysfonctionnement généralisé de l'Union européenne, accompagné d'injustices par rapport à notre contribution additionnelle. En effet, celle-ci finance le rabais qui est octroyé à des pays comme le Danemark, les Pays-Bas, la Suède, l'Autriche et l'Allemagne. Nous avons cédé à leur chantage puisque ces pays menaçaient, si nous revenions sur leurs rabais, de bloquer le plan de relance européen au pire moment de la crise. Nous sommes donc engagés dans un rapport de force défavorable avec ces pays.

Ce dysfonctionnement s'aggrave lorsque l'on voit l'incapacité des pays membres de l'Union européenne à se mettre d'accord pour dégager des ressources propres, qui représentent aujourd'hui moins de 20 % du budget européen, contre plus de 70 % pour les contributions des États. Par exemple, la taxe sur le numérique a été abandonnée par peur de représailles américaines. De même, la taxe sur les transactions financières a été abandonnée, notamment par la France, malgré le volontarisme de la présidence portugaise en 2021. Il n'y a enfin toujours pas d'avancée majeure s'agissant de l'harmonisation fiscale et d'une assise commune pour l'impôt sur les sociétés par exemple. Pour toutes ces raisons, la France passe à la caisse. Cela est d'autant plus insoutenable que, dans le même temps, la Commission européenne souhaite imposer le retour aux règles du pacte de stabilité et de croissance. Elle a certes proposé de réviser ces règles, mais sans changer ni les traités ni les seuils de 60 % de dette publique et de 3 % de déficit rapporté au PIB. Cela ne tient pas la route.

On nous propose donc ni plus ni moins un retour à la cure d'austérité, le gouvernement français, par la voix de Bruno Le Maire, nous ayant déjà annoncé hier des coupes budgétaires de plus de 15 milliards d'euros dès 2024. On pensait l'ordolibéralisme décrédibilisé, discrédité par la gestion de la crise de 2008, par le désastre humanitaire imposé en Grèce mais non, on nous invite à poursuivre, à continuer, et on se dit que l'Union européenne marche sur la tête en matière budgétaire.

J'aurais voulu terminer en rappelant que le fonds européen d'aide aux plus démunis est aujourd'hui sous-consommé en France, alors qu'il y a urgence à venir en aide aux associations, les Restos du Cœur notamment, et aux banques alimentaires. Je rejoins donc parfaitement le rapporteur Manuel Bompard dans son analyse et sa critique de cet article 33.

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