Nombre d'entre vous m'ont interrogé au sujet de Mayotte. Pour le Gouvernement, pour le ministre de l'intérieur, comme pour les élus locaux, la situation n'est pas si simple. J'ai dit qu'il fallait y durcir les conditions d'accès à la nationalité française et que le ministre de l'intérieur allait présenter un projet de loi en ce sens : je l'assume. Mais il faut sortir des raisonnements binaires. On ne peut pas dire non plus : « Tout le monde dehors ! ».
Et puis, ces flux migratoires sont aussi la preuve que la France est attractive, et j'aimerais parfois qu'on en soit fier, même si l'arrivée en Guyane de personnes venant de Syrie et d'Afghanistan pose des tas de problèmes. Pour avoir été préfet dans de nombreux territoires ultramarins, je peux vous dire que c'est une satisfaction de voir que la France est attractive et que les gens ont le sentiment qu'on y vit mieux qu'ailleurs. Cela donne de la fierté. Et cette fierté, elle s'est construite pas à pas, depuis 1946.
Certains nous reprochent de ne pas nous occuper des outre-mer, mais le budget qui leur est consacré est en augmentation et atteindra 21,7 milliards en 2023. Le PIB par habitant, à Mayotte, progresse de 3 % par an : même si on part de très bas, ce n'est pas rien. C'est un combat long et difficile ; être républicain, c'est aussi sortir des raisonnements binaires.
Il est faux de dire que les élus rejettent la République, monsieur Gillet. Au contraire, ils ont confiance en la France. Vous avez affirmé, monsieur Léaument, que j'avais tenu des propos choquants. Dire qu'il faut s'engager sur le chemin du mieux vivre, est-ce choquant ? Je ne le crois pas. J'ai précisément essayé, à la demande du Gouvernement, d'attaquer la colline avec l'ensemble des élus, en veillant à respecter la compétence des uns et des autres – élus, collectivités territoriales, communes. L'État n'a pas de compétence sur l'eau en Guadeloupe, et pourtant, nous sommes aux côtés des citoyens, des salariés et des élus. N'essayez pas d'opposer les gens, la situation est déjà assez compliquée !
Monsieur Serva, vous avez évoqué la situation des personnels soignants non vaccinés. J'ai reçu à deux reprises les représentants de l'Union générale des travailleurs de Guadeloupe (UGTG). Je leur ai fait part de mon incompréhension, je leur ai dit que je ne comprenais pas que les gens refusent de se faire vacciner. Nous n'avons pu que constater notre désaccord sur ce point. Je les connais depuis l'an 2000, nous avons déjà eu de nombreux débats et je crois qu'il existe entre nous un vrai respect mutuel. Nous essayons donc de construire une solution globale, mais le chemin est très étroit. J'ai fait des propositions et leur ai demandé de formuler les leurs, car ils sont, eux aussi, responsables de l'avenir de leur territoire. Il faut que nous trouvions ensemble ce chemin, cette porte étroite. Le drame, ce n'est pas le nombre de personnes concernées – moins de 200, si l'on ne tient pas compte des libéraux – mais l'incompréhension qui règne de part et d'autre.
Madame Desjonquères, tout ce que vous avez dit au sujet de la tempête Fiona est exact. Nous avons apporté une assistance technique, en envoyant trois ingénieurs, et débloqué immédiatement 10 millions d'euros sur le fonds de secours pour les outre-mer (FSOM), en direction des personnes qui ne sont pas concernées par l'arrêté de catastrophe naturelle.
Vous m'interrogez plus précisément sur la question de l'accès à l'eau. La tempête Fiona a été un déclic et nous a montré comment nous pouvions travailler ensemble sur cette question. Le problème, ce n'est pas l'argent. En plus des 10 millions du FSOM, nous ferons ce qu'il faut, dans le cadre du fonds exceptionnel d'investissement outre-mer (FEI). Par ailleurs, la Banque des territoires, la Caisse des dépôts et l'Agence française de développement sont prêtes à accorder des prêts sur soixante ans. Je le répète, ce n'est donc pas un problème d'argent. Ce qu'il faut, c'est se retrousser les manches et agir. Le problème est vieux de quarante ans : historiquement, on n'a rien fait. Mais je suis sûr que si on commence à faire les choses, on va avancer. Je fais confiance à Jean-Louis Francisque, le président du SMGEAG. Mon directeur de cabinet doit se rendre prochainement sur place pour veiller à l'« alignement des planètes », avec lui et le président de région, Ary Chalus. Nous tenterons ensemble d'accélérer la sortie de crise.
Madame Faucillon, vous dites que nous entendons « dégrader le droit du sol » à Mayotte. La situation est explosive ; il faut au moins nous mettre d'accord sur ce constat. Si le ministre de l'intérieur, dont c'est le boulot, propose une adaptation du droit du sol à Mayotte, je l'assumerai. Mais si vous avez une proposition claire pour régler le problème, je vous écoute ! Certains disent qu'il faut favoriser le développement économique des Comores : nous y avons consacré 150 millions d'euros ; d'autres qu'il faut développer l'hôpital d'Anjouan. Nous sommes ouverts à toutes les propositions. Mais ne faites pas croire que le Gouvernement pense que les gens font des enfants pour obtenir la nationalité française ! C'est faux.
Ce que nous voulons, c'est trouver des solutions pour faire face à une situation terrible. Que faire des mineurs non accompagnés (MNA) ? Que faire de tous les jeunes qui arrivent ? Il n'y a pas de solution miracle, et celui qui penserait la détenir serait dans le faux. Il faut agir dans tous les domaines, avancer sur la convergence sociale et sur la création de richesses, puisqu'il y a des entrepreneurs à Mayotte.
Je me bats d'ailleurs avec Bruxelles au sujet des droits de pêche : alors que les habitants de Mayotte meurent de faim, des bateaux étrangers viennent pêcher sur leurs côtes... Luttons avec les élus ! Il faut de la création de richesses, mais aussi une politique de maintien de l'ordre, une politique du logement, pour faire disparaître les bidonvilles, et de la fermeté en matière d'immigration. J'assume ce dernier point, même si cela ne me fait pas plaisir, même si cela passe par une adaptation du droit du sol.
Monsieur Serva, je vous ai déjà répondu au sujet de la réintégration des personnels médicaux non vaccinés. Le problème des déserts médicaux n'est pas propre à la Guadeloupe ; il se pose aussi en Nouvelle-Calédonie. Si l'on veut faire venir des médecins dans ces territoires, il faut que leurs conjoints puissent aussi trouver un travail : c'est la clé.
Monsieur Baubry, vous me demandez ce que je compte faire pour améliorer l'accès à l'eau en Guadeloupe. L'idéal serait que je n'aie rien à faire car, comme dans l'Hexagone, c'est une compétence locale. Mais, dans la mesure où il y a un vrai problème, il est normal que la solidarité nationale, sur le plan technique et financier, s'applique. C'est ce que vous votez régulièrement et je m'en réjouis.
Madame Obono, le temps est effectivement à la fermeté en matière de sécurité. J'étais récemment en Martinique ; vers dix heures, nous sommes allés faire un tour en ville et on m'a donné un gilet pare-balles. Croyez-vous que ce soit cela, notre France ?
D'ailleurs, nous n'avons jamais mis autant de moyens en personnels, en moyens à terre, en moyens marins, en radars aux Antilles et à Mayotte que depuis deux ans. Reconnaissez-le, monsieur Rambaud.
Oui, il y a des problèmes de scolarisation, de recrutements locaux, de convergence sociale, et nous y travaillons. Mayotte n'est un département français que depuis dix ans. On va progresser le plus vite possible ; un certain nombre de mesures seront prises dans le cadre du PLFSS et, je l'espère, également dans celui du PLFR.
Madame Bassire, nous allons nous battre, avec Sophie Brocas, directrice générale des outre-mer, pour qu'un taux élevé de défiscalisation soit maintenu.
Avons-nous manqué de compassion pour les familles après la tempête Fiona ? Je ne peux pas le laisser dire ; cela m'a presque ému aux larmes et un journal a souligné, dans l'un de ses titres, la compassion et le soutien du Gouvernement. J'ai écouté les gens et je peux vous dire que les familles ont reçu notre message de compassion.
S'agissant de l'accès à l'eau à Mayotte, madame Youssouffa, nous avons signé une convention de 411 millions d'euros, dont je suis très fier. Trois problèmes doivent encore être réglés. D'abord, seule une partie de l'usine de dessalement fonctionne actuellement. Je me suis investi personnellement entre la société des eaux de Mayotte et la filiale de Vinci, qui est délégataire de service public, pour relancer le fonctionnement de l'autre moitié de l'usine : nous y sommes. Ensuite, il faut construire en urgence la troisième retenue et créer une deuxième usine de dessalement. La question de la localisation de la troisième retenue est un problème local sur lequel je n'ai pas de prise, mais j'ai confiance : j'aide les gens à se mettre d'accord.
Enfin, le Président de la République a pris un engagement clair sur l'aéroport. Des problèmes techniques se posent et des études, pour plusieurs millions, ont été réalisées. Mais le projet, d'un coût de 500 millions d'euros environ, verra le jour ; veillons à ce qu'il se fasse dans le respect de l'environnement et qu'il tienne compte des risques sismiques.
Monsieur Rambaud, vous m'interrogez sur la présence militaire outre-mer. La loi de programmation militaire (LPM) prévoit déjà 3 milliards d'euros supplémentaires, rien que pour cette année. Je suis consulté sur ces sujets par le ministre des armées, parfaitement au fait, lui aussi. Rassurez-vous : la future LPM s'appuiera sur les outre-mer.
Madame Diaz, j'ai évoqué l'évolution institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie. Les trois référendums ont eu lieu. Le Président de la République a été très clair et je l'ai été moi aussi lors de mon déplacement. J'espère que nous arriverons ensemble à construire une Nouvelle-Calédonie meilleure, pour ses enfants.