Il y a trois axes pour réduire l'usage des produits phytosanitaires : il faut convaincre de l'intérêt et de l'utilité, inciter et parfois réglementer. On n'y parviendra pas en prenant les trois séparément. Je ne crois pas du tout que la réglementation puisse résoudre le problème. L'interdiction peut fonctionner pour certaines molécules, en particulier pour les molécules dites « CMR (cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques) 1 », qui ont très largement diminué. Néanmoins, ça ne permet pas d'atteindre l'objectif de baisse de 50 % sur les phytosanitaires.
En termes d'incitation, nous n'arrivons pas à répondre à l'enjeu de la prise de risque des agriculteurs. Il y a pourtant quelque chose à jouer à ce niveau-là. Nous n'avons pas une approche territoriale suffisante. Dans le futur système Écophyto, j'espère que nous serons collectivement capables d'intégrer le fait que n'importe quelle agriculture ne peut pas être à n'importe quel endroit. Il est frustrant de voir que nous ne parvenons pas à expliquer aux agriculteurs qu'au-delà de la production, il y a également l'eau potable dans un périmètre de captage. Aujourd'hui, nous transmettons ou agrandissons des fermes dans des périmètres de captage avec des modèles agricoles qui ne sont pas compatibles avec la qualité de l'eau bue. Nous acculons collectivement les agriculteurs en n'assumant pas l'enjeu sanitaire et environnemental propre à certains secteurs. Il y a aussi des sujets Natura 2000 dans certains endroits, avec des enjeux sanitaires et environnementaux.
Pour changer de braquet dans ces secteurs-là, il faudrait peut-être une action réglementaire, avec des systèmes de zone soumise à contrainte environnementale (ZSCE) et de MAEC collectifs beaucoup plus forts. Ça ne permettra peut-être pas de réduire les usages de 20 à 50 %. En revanche, ça résoudra le problème des risques et de l'impact. C'est un point important sur lequel nous butons aujourd'hui.