Nous nous posons cette question depuis quinze ans, monsieur le député. D'ailleurs, vous vous l'êtes posée vous-même en travaillant sur le plan Écophyto. Je ressens une véritable frustration quant aux résultats que nous n'arrivons pas à atteindre collectivement depuis quinze ans dans le cadre du plan Écophyto. Je reste persuadé qu'il est possible de diminuer largement la quantité de produits phytosanitaires utilisés et je suis frustré que nous n'y parvenions pas.
Lorsque je regarde le plan Écophyto, je trouve que le réseau des 3 000 fermes Dephy a bien joué son rôle. Sans reconception des modèles, en utilisant simplement des itinéraires techniques qui ont été écrits, documentés et partagés, nous constatons une baisse de 20 à 40 % de la quantité de phytosanitaires utilisés. La moyenne est plus ou moins de 25 %, en fonction des filières. Aujourd'hui, sans changer le modèle agricole ou la production, avec une optimisation un peu plus fine, on peut diminuer de 25 %. Le démonstrateur a fonctionné et il fonctionne aujourd'hui.
Néanmoins, cela pose toute une série de difficultés. La massification n'a pas fonctionné. En toute humilité, j'ai une idée des choix qu'un agriculteur est amené à faire. Aujourd'hui, nous ne parvenons pas à gérer la prise de risque qu'on fait peser sur les agriculteurs. Les produits phytosanitaires sont aujourd'hui un moyen d'avoir une certaine « assurance récolte ». En cas d'incertitude quant à l'avenir, vous avez même tendance à en mettre un peu plus plutôt qu'un peu moins. Si vous vous trompez, c'est votre récolte qui est en jeu. Lorsque vous n'avez pas de récolte, vous n'avez pas de revenus.
Je comprends la difficulté de la massification. Le plan Écophyto a permis de définir des itinéraires techniques et de montrer des choses faisables. Pour autant, nous n'avons pas trouvé le moyen de massifier ce système à ce jour. C'est bien documenté dans le rapport de la Cour des comptes. Aujourd'hui, les 643 millions d'euros mis sur la table ne sont pas énormes, si on les rapporte aux 9 milliards d'euros de la PAC.