Merci de nous avoir conviés à cette commission d'enquête. Je reviendrai sur certains points que vous avez soulevés dans votre introduction. Comme vous m'avez invité à le faire, je vais commencer par présenter l'Office français de la biodiversité ainsi que moi-même, même si certains d'entre vous me connaissent depuis déjà quelques années.
Je travaille sur la thématique des phytosanitaires depuis longtemps. J'ai été conseiller de Jean-Louis Borloo dans le cadre du Grenelle de l'environnement, au moment de la question de la redevance pour pollution diffuse et son affectation. J'ai été directeur de l'agence de l'eau Artois-Picardie pendant six ans. C'est elle qui percevait la redevance pour pollution diffuse pour l'ensemble des agences. J'ai occupé d'autres postes et je suis aujourd'hui directeur général de l'Office français de la biodiversité depuis le début du mois de juin.
Si le plan Écophyto était périphérique, la thématique des phytosanitaires se retrouve finalement dans bon nombre de nos missions. L'Office français de la biodiversité est un établissement public de l'État sous double tutelle. Il est d'une part sous tutelle du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires et, d'autre part, sous tutelle du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Cet établissement porte donc des missions pour l'ensemble de ces deux ministères.
Notre mission est bien évidemment de lutter contre l'érosion de la biodiversité, qui tient à cinq grandes causes. Les pollutions chimiques sont l'une de ces causes. Des déversements de substances, dont les produits phytosanitaires, dans l'environnement créent des déséquilibres. Il est ainsi très important de garder une agriculture extensive pour lutter contre l'érosion de la biodiversité. Les autres facteurs d'érosion sont le changement d'affectation des sols hors fragmentation, la surexploitation des ressources, le changement climatique et les espèces exotiques envahissantes.
L'Office français de la biodiversité est composé de 3 000 personnes, dont 2 000 sur le terrain et 1 700 inspecteurs de l'environnement. Nous avons cinq grandes missions en lien avec la thématique des phytosanitaires. La première mission est la police de l'environnement. Nos 1 700 inspecteurs de l'environnement sont des agents commissionnés et assermentés. Leur métier consiste à organiser la surveillance dans les territoires et le respect de la réglementation du code de l'environnement.
Je précise qu'ils ne sont pas compétents pour le contrôle administratif de la partie réglementaire du code rural. Or, les phytosanitaires figurent essentiellement dans le code rural. Nos agents ne peuvent donc pas faire de contrôles ni de rapports administratifs pour manquement dans le domaine des phytosanitaires. Nous sommes cependant conduits à intervenir en vertu de notre compétence dans le domaine judiciaire. Il y a donc des subtilités importantes. Certains manquements peuvent être constatés et s'orienter vers la voie judiciaire. C'est dans cette situation que nos agents peuvent être saisis pour ce qui concerne les phytosanitaires, mais ils sont alors exclusivement sous l'autorité du procureur, et non sous l'autorité administrative.
C'est un sujet à creuser car il induit un certain nombre d'incompréhensions. En matière de produits phytosanitaires, nous ne pouvons pas faire de contrôles normaux, comme nous en faisons dans le domaine de la sécheresse, de la police de l'eau, etc. Ces contrôles peuvent être l'occasion de sensibiliser, d'ouvrir la discussion.
Notre deuxième grande mission – pour suivre l'ordre tel qu'il est défini dans la loi – est la connaissance. L'OFB dépense beaucoup d'énergie sur des missions d'acquisition de connaissances. Une centaine d'agents font de la recherche, de l'expertise, de l'acquisition de données et du partage.
En guise d'illustration, dans le domaine des phytosanitaires, nous exploitons la banque nationale des ventes des distributeurs de produits phytosanitaires (BNVD) avec l'agence de l'eau Artois-Picardie, qui perçoit les redevances phytosanitaires et saisit les données dans la BNVD. Nous utilisons ensuite ces données pour caractériser un certain nombre d'éléments permettant de définir les quantités de produits réellement utilisées. Ça nous permet de partager les connaissances.
Nous exploitons et entretenons les systèmes d'information sur l'eau, la biodiversité et le milieu marin. On note à ce sujet que les produits phytosanitaires sont un point de difficulté important pour atteindre nos objectifs de qualité des eaux, en application de la directive-cadre sur l'eau.
Notre troisième mission est l'appui aux politiques publiques. Nous sommes, là encore, très sollicités dans le domaine des produits phytosanitaires. Je pourrais notamment citer la stratégie nationale sur la biodiversité, en cours de finalisation. Le projet a été partagé et le gouvernement récolte actuellement les avis des différentes grandes instances, telles que le Comité national de la biodiversité, le Comité national de l'eau, etc. Nous continuons à travailler en lien étroit avec le ministère pour proposer des indicateurs et des affiches actions. Nous piloterons un certain nombre de fiches de ce plan.
Nous intervenons également sur un certain nombre de caractérisations et de réflexions, notamment sur la haute valeur environnementale (HVE).
Notre quatrième mission est la gestion d'espaces naturels. Au sein de l'Office français de la biodiversité, nous gérons en propre un certain nombre de sites : des parcs naturels marins en mer, des réserves naturelles nationales, des réserves nationales de chasse et de faune sauvage et des sites Natura 2000 en mer.
Il y a également des sites non protégés, mais qui sont très importants puisqu'ils nous permettent d'avoir des sites pilotes. Ils démontrent notamment qu'on peut avoir des activités économiques de loisirs et des sites exceptionnels de biodiversité. Je pense en particulier à notre site de Saint-Benoît, où nous faisons de l'agriculture, et à des sites pilotes Agrifaune. Ce site de biodiversité est assez remarquable. Nous en avons d'autres, notamment dans la Dombes, où on teste l'agriculture, la pisciculture et l'environnement.
Notre dernière grande mission est l'appui aux gestionnaires d'espaces naturels et à la mobilisation de la société. Ce sont de nouvelles missions depuis la création de l'Agence française de la biodiversité en 2016. Il faut connaître la biodiversité pour la protéger. À cette fin, nous avons des missions d'éducation, d'information, de sensibilisation et de mobilisation des particuliers, des entreprises et des collectivités. Il s'agit de comprendre les dangers liés à l'érosion de la biodiversité et de trouver des solutions de conciliation de nos différentes politiques publiques.
De par notre double tutelle, notre objectif est bien de concilier les différentes politiques publiques, notamment la politique agricole, la politique de préservation de l'environnement et la politique de transition énergétique. Ce sont des sujets difficiles dès lors qu'on s'engage dans des voies de mutation et d'évolution. Notre travail consiste bien à trouver des solutions et à construire des modèles, notamment dans le domaine des phytosanitaires, et non à opposer ces politiques publiques. Au terme de cette introduction, je me tiens à votre disposition.