Je pense que votre première question fait référence aux engrais perlés provenant de Chine, qui sont effectivement riches en azote. Nous nous sommes récemment emparés de ce sujet à l'INAO, mais cela prend malheureusement un peu de temps. Ce sont des engrais sur lesquels nous avons des doutes et les organismes de contrôle n'ont pas été autorisés à aller vérifier ce qui se passait en Chine. Vous imaginez donc la situation dans laquelle nous sommes. La Fédération nationale de l'agriculture biologique a, parmi d'autres, alerté l'INAO sur ce sujet. La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) vient d'interdire trois produits, l'Europe nous ayant autorisés à le faire. J'observe que les fabricants mettent des nouveaux produits sur le marché très rapidement, alors que le temps de réponse juridique est assez long. Je fais partie d'une commission qui a été mise en place pour s'assurer que les engrais azotés mis sur le marché sont bien obtenus de façon naturelle, et non par synthèse.
Pour résumer, de l'ammonitrate est ajouté dans les engrais chinois. C'est fermenté avec beaucoup d'azote et il n'y a rien de naturel là-dedans. Voilà où nous en sommes à ce jour. J'espère que cela va aller vite, mais ce n'est pas forcément simple entre les différents services de l'État. Il faut définir une stratégie juridique car vous imaginez bien que le fabricant va se défendre. Quoi qu'il en soit, c'est vraiment un sujet auquel nous sommes attentifs et sur lequel nous avons envie d'avancer rapidement.
Vous évoquez par ailleurs le développement de l'agriculture bio à grande échelle. Il existe un modèle du nom de Tyfa. L'une des études réalisées en la matière démontre qu'on pourrait largement développer le bio à l'échelle européenne, sans porter préjudice ni à la souveraineté alimentaire ni aux exportations françaises. Il est vrai que notre modèle agricole produit beaucoup et exporte beaucoup. En France, on exporte notamment beaucoup de céréales. Pour autant, on importe également beaucoup. C'est le delta qui compte.
Ces questions méritent d'être travaillées. Il est possible de « désintensifier » l'agriculture européenne sans mettre en péril ni la souveraineté alimentaire ni les exportations françaises, qui sont essentiellement des produits à forte valeur ajoutée : le cognac, les vins, les spiritueux, etc. Il y a bien évidemment des exportations de céréales, mais il convient de regarder la balance par rapport aux importations de soja. Ce problème est donc à regarder non seulement sous l'angle des exportations, mais également sous l'angle de l'équilibre général entre les imports et les exports.