Les crédits de la mission Asile, immigration et intégration du projet de loi de finances pour 2024 sont un prélude au énième projet de loi sur l'immigration, annoncé pour décembre, qui sera la dernière pierre à l'édifice de politiques migratoires toujours plus répressives et déshumanisées. Ni les chiffres ni les grandes annonces du Gouvernement ne mentent sur ses priorités : criminaliser, enfermer et détricoter le droit d'asile.
La France continue, encore et toujours, d'investir dans les CRA. Ces dernières années, l'enfermement en CRA, pourtant facultatif selon la loi, est devenu quasi systématique, et la durée de rétention a augmenté. En dépit de onze condamnations par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), la France continue d'enfermer des enfants, notamment à Mayotte, où le nombre d'enfants en CRA est trente fois plus élevé que dans l'Hexagone.
Quant au droit d'asile, pourtant fondamental, il reste sous-financé. D'après le bleu budgétaire, seuls 59 % des demandeurs d'asile ont obtenu un hébergement en 2023. Face à ces besoins, la création en 2024 de 1 000 places d'hébergement pour les demandeurs d'asile est dérisoire.
Par ailleurs, le Gouvernement demande à l'OFPRA de rendre 15 000 décisions de plus en 2024. Quels moyens lui accorde-t-il pour ce faire ? Dix-sept équivalents temps plein (ETP) supplémentaires. Le Gouvernement organise l'affaiblissement de notre système d'asile en imposant des délais de procédure toujours plus courts et des objectifs de traitement des demandes toujours plus élevés à des instances en sous-effectif n'ayant même pas les moyens d'examiner les demandes de façon sereine et individualisée.
S'agissant de la partie thématique du rapport, je prends note avec déplaisir de l'enthousiasme pour l'externalisation du traitement des demandes de visas dont il fait preuve, alors même que nos services consulaires souffrent de décennies de réduction des coûts et des effectifs. Loin de proposer de lui apporter les moyens nécessaires, le rapport suggère de porter un coup fatal à ce service public essentiel.
S'agissant de la dimension européenne de la politique migratoire, le rapport disserte longuement sur les franchissements irréguliers aux frontières extérieures de l'UE mais demeure silencieux sur les drames humains qu'entraînent les politiques sécuritaires. De janvier à septembre 2023, plus de 2 500 personnes sont mortes ou portées disparues en tentant de traverser la Méditerranée.
Quant à l'accord entre l'UE et la Tunisie, le rapport ne mentionne pas une seule fois les discours haineux envers les migrants du président autocrate Kaïs Saïed, ni les violences et les transferts forcés de centaines de personnes dans le désert, à la frontière libyenne. La politique migratoire actuelle est inefficace pour prévenir ces drames. Pire, elle y contribue. Pourtant, l'UE et la France s'enferrent dans cette impasse.
Le groupe LFI-NUPES rejette ces crédits, qui consacrent et renforcent des politiques toujours plus sécuritaires, inhumaines et inefficaces.