Je ne me livrerai pas, comme d'autres orateurs, à un décompte des 49.3 : treize, quatorze, bientôt quinze. Je ne mentionnerai pas davantage le dépôt pavlovien de motions de censure. Les membres de mon groupe ont déjà eu l'occasion de le dire à cette tribune : l'article 49, alinéa 3 affaiblit la pratique démocratique et le gouvernement qui y recourt. Mais l'accumulation des échecs des motions de censure – sans doute y en aura-t-il un nouveau cet après-midi – tend à banaliser le recours à cette procédure d'exception. Ainsi assistons-nous à une sorte de bras de fer stérile qui ne tient que par un équilibre de menaces et de pressions.
S'agissant du 49.3, vous aviez annoncé à mots à peine couverts, madame la Première ministre, qu'il deviendrait la norme s'agissant des textes budgétaires. Néanmoins, au-delà de son caractère désormais automatique, je ne peux que regretter que vous l'ayez dégainé si tôt. Vous en avez parfaitement le droit : la Constitution vous permet d'y recourir de manière illimitée pour faire adopter les textes budgétaires. Mais, nous le voyons bien, cette pratique du pouvoir a des effets néfastes sur nos institutions.
Elle donne le sentiment que ce que nous votons ici n'a pas d'importance et que notre rôle de représentants élus démocratiquement est insignifiant, et vous dérange presque. Je crois, pour ma part, que si les oppositions ne sont pas écoutées dans un cadre institutionnel démocratique, elles risquent de s'exprimer plus violemment en dehors de ce cadre.
Pourtant, nous avons joué le jeu : des députés de mon groupe, Paul-André Colombani et Laurent Panifous, ont participé à votre ébauche de concertation dans le cadre des comptes de Ségur. En fin de compte, je m'interroge : à quoi cette concertation a-t-elle servi ?