Intervention de Éric Coquerel

Séance en hémicycle du mardi 24 octobre 2023 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Coquerel, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

…l'hôpital se trouvant précisément dans une situation telle qu'il lui était très difficile de surmonter cette crise sanitaire.

Or le déficit structurel des hôpitaux devrait s'aggraver en 2023 en raison d'une explosion des coûts de l'énergie. En conséquence, les fermetures de lits se poursuivent et les structures d'urgence sont obligées de fermer temporairement. Cet été, ces fermetures ont concerné près d'une structure sur deux. Les soignants subissent aussi cette situation. Leurs conditions de travail se sont fortement dégradées et les revalorisations sont insuffisantes pour provoquer le « choc d'attractivité » promis.

Malgré la diminution du pouvoir d'achat qui menace la consommation populaire, le reste à charge continue d'augmenter au détriment de la santé des plus pauvres. Selon un sondage Ifop de septembre dernier, 37 % de la population ont déjà renoncé à des soins ou à des équipements médicaux alors qu'ils en avaient besoin. Mais aucune mesure de ce PLFSS ne répond à ces besoins.

Les objectifs de dépenses sont insuffisants. L'Ondam pour 2024 devrait augmenter de seulement 3,2 %, soit une évolution, certes légèrement supérieure à l'inflation 2024, mais insuffisante pour rattraper la non-compensation de l'inflation des deux dernières années. Pour la Fédération hospitalière de France, ce sous-financement des hôpitaux s'élève à 2 milliards d'euros. C'est un véritable effort financier qui est ici imposé aux établissements de santé, de sorte que nous nous acheminons vers un système de santé à deux vitesses, où le public est de plus en plus distancé par le privé.

C'est aussi aux travailleurs que ce texte s'attaque en instillant le soupçon d'un recours illégitime à leurs droits. Ce PLFSS prévoit ainsi de renforcer les modalités de contrôle des médecins prescripteurs et des assurés bénéficiant d'arrêts maladie ou encore de limiter à trois jours la durée des arrêts prescrits lors d'une téléconsultation.

Si le Gouvernement veut enrayer la hausse du volume des indemnités journalières, qu'il cherche d'abord à lutter contre l'explosion des risques psycho-sociaux. Le recours aux arrêts maladie n'est pas un luxe pour les salariés. Je tiens d'ailleurs à rappeler aux membres du Gouvernement présents que selon une étude d'un groupe de protection sociale bien connu, 25 % des arrêts ne sont pas pris, ou de manière partielle, et que 37 % des personnes interrogées ont déclaré avoir déjà travaillé alors qu'elles étaient malades. Ce n'est pas sur ce type d'économies que le Gouvernement devrait compter.

Voilà le contexte dans lequel s'inscrit ce PLFSS, sachant que 87 milliards d'euros d'exonérations et de réductions sociales ont encore été accordées en 2023, principalement aux entreprises les plus grandes et les plus polluantes. Reportez-vous plutôt sur ces recettes dont, une fois de plus, vous vous privez, ou que vous compensez par le produit de la TVA dont ce n'est pas le rôle.

Face à cette situation préoccupante, différentes prises de position, venues notamment des bancs de la NUPES, vous ont fort heureusement obligés à reculer sur certaines mesures injustes, comme la hausse des franchises médicales, la ponction des réserves de l'Agirc-Arrco, ou la réforme des modalités d'indemnisation du déficit fonctionnel permanent. J'espère que le recours au 49.3 ne sera pas l'occasion de les réintroduire : un tel choix ne ferait en effet qu'accentuer votre entreprise de destruction à petit feu de notre modèle social, déjà bien attaqué par les mesures figurant dans le texte.

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