Enfin, je n'ignore pas l'écart grandissant entre le désir d'enfants et le nombre d'enfants mis au monde dans chaque famille, avec une natalité en baisse tendancielle depuis dix ans. Si le service public de la petite enfance est un premier élément de réponse, nous devons aller bien au-delà, en levant les tabous liés à l'infertilité – j'ai lancé des travaux à ce sujet avec le ministre de la santé et de la prévention –, mais aussi en laissant plus de liberté et de choix aux familles. Conformément à ce qu'a annoncé la Première ministre la semaine dernière, je lancerai dès demain une concertation avec l'ensemble des organisations syndicales et patronales sur la réforme du congé parental que je me suis engagée à conduire. Nous voulons faire du congé parental une période d'interruption choisie, mieux rémunérée et partagée entre les parents. Devenir parent ne doit jamais être un frein, ni à la vie professionnelle, ni à la vie sociale : c'est à cela que nous devons travailler. Nous avons la responsabilité de permettre à toutes les familles de choisir librement et réellement leur organisation familiale et la manière dont elles concilient vie professionnelle et vie personnelle, quelle que soit leur configuration.
L'autonomie est également au cœur de l'action de mon ministère : au cœur des solidarités, d'une part, puisqu'il s'agit de prendre en compte toutes les fragilités sans céder à l'exigence de garantir effectivement les droits et d'assurer la pleine participation de chacun à la vie collective ; au cœur des familles, d'autre part, puisque toutes sont concernées par la perte d'autonomie, que celle-ci touche un enfant, un conjoint, une mère ou un grand-père. Il y va de notre devoir d'accompagner les familles, en particulier de prendre soin de ceux qui prennent soin des autres. Je suis convaincue que ce n'est que collectivement que nous pourrons faire face au défi démographique, en adaptant dès maintenant notre société au vieillissement. En effet, en 2030, un Français sur trois aura plus de 60 ans et, pour la première fois dans notre histoire, les plus de 65 ans seront alors plus nombreux que les moins de 15 ans.
Pour assurer la nécessaire adaptation au vieillissement, l'objectif global de dépenses qui finance nos établissements pour personnes âgées et en situation de handicap augmentera de 4 % en 2024, soit bien plus que les 2,6 % d'inflation anticipés. Cette importante hausse des moyens traduit le respect de nos engagements – vous les connaissez – envers les familles et les professionnels du secteur. Je l'ai dit, je crois profondément au libre choix des individus : c'est pour répondre à la volonté des Français, qui souhaitent très majoritairement vieillir chez eux, que nous avons entrepris le virage domiciliaire. Dès le début de l'année 2024, une nouvelle aide financière baptisée Ma Prime Adapt' permettra de financer les adaptations du logement et de prévenir la perte d'autonomie.
Les moyens prévus par le PLFSS pour 2024 nous permettront également de poursuivre le développement des centres de ressources territoriaux (CRT), pour enfin décloisonner les interventions auprès des personnes âgées à domicile et simplifier leurs démarches. Ce déploiement s'inscrit dans la dynamique du service public départemental de l'autonomie, qui vise à créer un guichet unique physique, avec un accueil humain, pour mettre fin au parcours du combattant – voire l'errance – de nos aînés et de leurs familles. Ce projet d'humanisation et de simplification de nos services publics, très ancré dans les territoires, a déjà commencé à se concrétiser : dès la rentrée, j'ai adressé aux conseils départementaux un appel à manifestation d'intérêt pour sélectionner les premiers départements pilotes.
Dans le prolongement des réformes structurelles que nous menons pour développer et accompagner les services à domicile, des moyens supplémentaires sont consacrés à leur montée en charge et au soutien des aides à domicile. Le tarif plancher national, fixé à 22 euros en 2022 avant d'être augmenté à 23 euros en 2023, sera indirectement indexé sur l'inflation à compter de 2024, et la dotation complémentaire de 3 euros par heure, dite « bonus qualité », qui vise à garantir l'amélioration de la qualité du service rendu à l'usager, est désormais en vigueur. En outre, 25 000 nouvelles places en services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) seront créées d'ici à 2030, afin d'offrir un accompagnement adapté à toutes les personnes en perte d'autonomie – surtout les plus vulnérables –, et dès le 1er janvier 2024, les bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) bénéficieront de deux heures supplémentaires par semaine dédiées à l'accompagnement et à la lutte contre l'isolement social. Le financement de cette mesure destinée à rompre l'isolement de nos aînés, mais aussi à aider les aides à domicile à travailler à temps plein, montera en charge jusqu'en 2027.
Dès le 20 novembre, nous irons plus loin dans le cadre de la suite de l'examen de la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France. Je tiens à saluer l'engagement d'Annie Vidal et Laurence Cristol, rapporteures de ce texte qui offrira des avancées très concrètes aux aides à domicile, comme la création d'une carte professionnelle et d'un fonds de soutien à la mobilité, pour qu'enfin elles n'aient plus à payer pour avoir le droit de travailler. Si l'apport déterminant de ces femmes à notre société – car avec 99 % de femmes, c'est le métier le plus féminisé de notre pays – n'est évidemment plus à prouver, ces travailleuses de première ligne sont pourtant parmi les plus mésestimées du secteur médico-social. Nous devons continuer à mieux reconnaître et mieux valoriser ces métiers : c'est une question de dignité et de justice. Je veux également remercier Dafna Mouchenik et Myriam El Khomri pour leur mobilisation de longue date sur ce sujet et le remarquable travail qu'elles ont mené dans le cadre du Conseil national de la refondation consacré au bien vieillir, ainsi qu'Astrid Panosyan-Bouvet et Caroline Janvier, que je sais très mobilisées sur ces enjeux, pour la grande qualité de leurs travaux.
Pour proposer un véritable parcours résidentiel adapté aux besoins et aux envies de nos concitoyens, nous devons continuer à développer, dans tout le territoire, des structures d'habitat intermédiaire entre le domicile et l'Ehpad – un sujet sur lequel Mickaël Cosson est très impliqué. Dès 2024, plusieurs millions d'euros seront ainsi alloués aux conseils départementaux pour soutenir le développement de cet habitat inclusif.
Pour garantir ces logiques de parcours résidentiel, nous devrons aller bien au-delà. Pour consolider et assurer la qualité de l'offre d'accompagnement des personnes âgées en établissement, le PLFSS pour 2024 concrétise une nouvelle étape de notre engagement de créer 50 000 postes supplémentaires dans les Ehpad. Environ 6 000 postes supplémentaires de soignants seront ainsi créés l'année prochaine, contre 3 000 cette année.