Intervention de Alexandre Holroyd

Réunion du mercredi 11 octobre 2023 à 13h30
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexandre Holroyd, rapporteur :

Pour répondre à M. Sabatou, cette réforme ne donne pas plus de pouvoirs à la Commission européenne. Elle donne un mandat au Conseil européen, où siège le chef d'État français. Il se trouve que le Rassemblement national échoue tous les cinq ans à faire élire un chef d'État français mais, aujourd'hui, c'est un chef d'État élu démocratiquement par les Français qui siège à ce Conseil européen et qui a de facto quasiment un pouvoir de veto sur ses décisions. Deuxièmement, je trouve qu'il y a une certaine confusion dans votre position. Pourquoi est-ce que ces règles ont été édictées à l'origine ? Parce que nous avons une monnaie commune. La position du Rassemblement national sur la monnaie commune est difficile à suivre. À partir du moment où vous avez une monnaie commune, vous vous exposez à des risques financiers communs. Il paraît absolument nécessaire, et tous les économistes de la planète sont d'accord pour le dire, d'instaurer un semblant de coordination budgétaire. Certains vont même jusqu'à prôner une politique budgétaire alignée. Je pense qu'il faut que le Rassemblement national clarifie sa position. Est-ce que, comme pendant trente ans, cinquante ans il est toujours aujourd'hui contre le principe d'union économique et monétaire ou est-ce qu'il est prêt à permettre de prendre des mesures pour l'accompagner ? Nous parlons ici de règles économiques et monétaires qui permettent d'avoir une cohérence. Il est temps d'avoir une position cohérente. Vous ne pouvez pas vouloir une monnaie commune qui donne des avantages sur les marchés financiers et aucune règle. Nous sommes tous des États souverains en position de dire « non », tous en position de sortir de l'Union européenne. Les Britanniques sont sortis de l'Union européenne. Ils en ont le droit. Est-ce c'est ce que vous proposez ? Donnez-nous une indication claire sur la position du Rassemblement national.

Sur la question que vous avez posée, et qui est fondamentale, je n'ai pas une réponse parfaite à vous donner. Vous avez raison, au cœur de cette proposition réside un outil qui s'appelle l'analyse de la dette. Cet outil est basé sur toute une panoplie d'indicateurs : évidemment, si vous modifiez les paramètres cela aboutit à des résultats différents. C'est pour cela qu'il est important que le Parlement comprenne ces outils, comprenne ces paramètres – qu'il soit d'accord ou pas avec eux – et que chacun ici présents puisse en tirer les conclusions qu'il veut. Aujourd'hui je n'ai pas de visibilité sur ces paramètres, sur la manière dont ils sont fixés et qui donnera en bout de chaîne les résultats dont il est question dans cette réforme. Je suis déçu : je présente un rapport avec ma collègue Marietta Karamanli, qui est d'un autre parti, dans lequel j'indique qu'il faut que nous examinions les décisions qui sont négociées à Bruxelles, exercice de souveraineté s'il en est un et vous n'avez pas un mot pour soutenir cette proposition. C'est étonnant, vous devriez la soutenir à votre corps défendant.

Monsieur Chassaigne, la France n'a pas équilibré un budget depuis 1974. L'austérité budgétaire existe dans votre imaginaire, pas dans la réalité telle qu'elle est perçue par les économistes. L'austérité budgétaire a en revanche été appliquée dans certains pays européens, Marietta Karamanli peut en témoigner pour la Grèce. Je suis le premier à dire que ce fut un désastre. Il n'y a pas d'austérité budgétaire en France, les dépenses croissent d'année en année. Cette année nous allons emprunter 280 milliards d'euros pour financer nos dépenses publiques. Vous dites que la Commission met en œuvre la politique des marchés financiers mais c'est un fantasme. L'Agence France Trésor s'endette directement auprès des marchés financiers. Ça ne passe pas par la Commission. La réalité c'est que l'euro réduit notre coût d'emprunt et l'exemple du Royaume-Uni nous montre que sortis de l'euro, sortis de l'Union européenne notre coût d'emprunt serait renchéri. Ces déficits ont été utilisés pour protéger les Français. Nous sortons de la période Covid avec le chômage partiel et l'indemnité énergie que vous avez votés à nos côtés. Nous avons une vision de la politique budgétaire de la France très différente, on ne va pas se voiler la face. Mais nous devrions nous retrouver derrière des propositions pour accentuer le rôle de la représentation nationale sur ces questions dans le débat européen. Un rôle que les parlements nationaux d'autres États exercent. Un dernier point sur la transition verte, pour lequel je partage un petit différend avec Marietta Karamanli, qui ne porte toutefois pas sur les objectifs. Marietta Karamanli propose d'extraire les trajectoires des investissements verts. Je ne pense pas que ce soit la bonne méthode car si l'on ouvre ce chantier, va s'ouvrir une négociation dont seuls nous Européens avons le secret pour définir ce qui est vert et ce qu'il ne l'est pas. Je suis d'accord avec vous sur le fait qu'il faut investir dans le domaine de la transition verte. Chaque État membre a une feuille de route, chez nous c'est la SNBC. Donc plutôt une différence de méthodologie que d'objectifs.

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