Le point fort du modèle français tient aux textes et référentiels, qui sont très détaillés. Les structures d'intervention françaises sont rapidement mobilisables et de nombreux corps en uniforme conservent un esprit assez militaire, voire militariste. Ces structures présentent donc une bonne discipline. En France, l'attitude militaire facilite le commandement ; ce dernier est parfois rigide, mais clair et bien structuré.
Le point faible du modèle français concerne la difficulté à faire face à une catastrophe potentielle avec des sinistrés de différentes langues. Par contraste, chaque Belge parle couramment quatre langues, ce qui simplifie la communication en cas d'accident touchant des personnes d'autres pays d'Europe. Il est primordial qu'à l'échelle de l'Europe, le système de protection et de sécurité civiles dispose d'un réseau de personnes ressources de référence, connues à l'avance. Trouver le bon interlocuteur dans un autre pays et entrer en contact avec lui est toujours délicat. Les centres de crise rattachés au ministère de l'Europe et des affaires étrangères disposent d'intervenants mobilisables, mais ces derniers n'ont pas toujours une bonne connaissance de la gestion des crises. Ainsi, lorsqu'un accident fait des victimes appartenant à dix pays différents, il est très compliqué de trouver, dans chacun de ces pays, la personne à contacter pour activer le plan catastrophe et les plans de contingence.
Si le système français paraît bien organisé en théorie, je doute que la rapidité d'activation soit équivalente dans tous les départements. La qualité et l'expérience des cellules d'urgence médico-psychologique (CUMP) sur l'ensemble du territoire sont très disparates. Les ressources en zone rurale sont bien plus limitées que dans les grandes villes, ce qui est normal dans un grand pays tel que la France. Toutefois, j'ai le sentiment qu'une certaine rivalité perdure dans les grandes villes, entre les différents acteurs amenés à travailler ensemble. Je l'ai d'ailleurs constaté lors des attentats terroristes : certains professionnels voulaient être les premiers présents auprès des victimes.
Les attentats terroristes à l'aéroport de Bruxelles ont confirmé l'importance d'une approche pluridisciplinaire. En effet, les forces de police, les forces de l'ordre et l'armée belges n'avaient jamais eu l'occasion de travailler ensemble sur des événements de cette ampleur. Un inspecteur de police ayant trouvé un chargeur de fusil militaire avait ainsi lancé l'alerte, croyant qu'il s'agissait d'un chargeur de kalachnikov. Le peloton militaire qui patrouillait à l'aéroport revenait du Mali, où il avait assuré la protection des troupes françaises. Il a observé une réaction tout à fait appropriée à l'événement. Ce fait montre que les attitudes des policiers étaient très différentes de celles des militaires.
Pour améliorer la prise en charge des événements majeurs, il faut donc s'attacher à impliquer les différentes disciplines (services de secours, secours médicaux, pompiers, armée et police) dès la formation et les faire travailler ensemble. Ces services doivent être placés dans des situations de simulation très réalistes et être entraînés de manière collective.