Intervention de Jean-Louis Bourlanges

Réunion du mercredi 11 octobre 2023 à 15h05
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bourlanges, président :

Je tiens à remercier nos trois invités, messieurs Dominique Moïsi et Frédéric Encel, spécialistes de la géopolitique, ainsi que monsieur Élie Barnavi, ancien ambassadeur d'Israël en France et avec lequel j'ai des liens politiques extrêmement forts sur la construction de l'Europe.

Nous avons organisé cette réunion dans des délais très courts pour des raisons que nous aurions, évidemment, souhaité ne pas avoir à connaître. Ce qu'il s'est passé ces derniers jours sur le territoire israélien a été pour chacune et chacun d'entre nous, quelles que soient ses opinions, la cause d'une profonde douleur et d'une profonde tristesse. Je tiens à exprimer solennellement, comme nous l'avons fait hier en observant une minute de silence alors que nous recevions Mme Catherine Colonna, ma profonde solidarité et celle de la très grande majorité, sinon la totalité, de nos collègues de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale, pour le peuple israélien, pour ses souffrances, pour la précarité qu'il ressent à juste titre et la menace qui l'affecte constamment de génération en génération. Il y a là quelque chose dont nous devons mesurer la gravité.

Il y a toujours le moment de l'émotion, le moment de la dénonciation de l'horreur, du fanatisme, de la violence, de la brutalité, des crimes. Enlever des femmes, des enfants, des vieillards, les incarcérer, les humilier, tuer de façon indistincte des civils : c'est ce que nous ne voulions plus revoir. C'est pourtant ce que nous avons revu ces derniers jours !

Notre commission a aussi pour rôle de réfléchir à ce qu'il s'est passé, à la complexité de la situation et à ce que nous devons faire. Nous avions décidé, à la demande du bureau, de nous réunir à chaque événement important. Cette réunion a justement pour objectif de nous aider à comprendre, à apprécier ces événements et la façon dont nous devons orienter notre politique dans les semaines et les mois qui viennent.

Trois personnalités remarquables s'associent aujourd'hui à notre réflexion. Nous accueillons ainsi Frédéric Encel, à qui nous avons récemment remis le prix géopolitique : c'est un analyste confirmé des problèmes stratégiques et militaires. Nous recevons également mon vieil ami Dominique Moïsi, qui est l'un des spécialistes les plus respectés, par l'acuité de son jugement, l'équilibre de ses prises de position, et par son souci de coller aussi près que possible à la vérité, à la justesse et à la justice des situations. Enfin, je salue Élie Barnavi, qui a été ambassadeur d'Israël à Paris ; il a ensuite suivi avec une attention particulière l'évolution politique en France et en Europe car il est très attentif à la construction européenne : il a notamment dirigé un formidable dictionnaire sur les affaires européennes

Je dois dire, cher ami, que nous avons lu votre tribune dans Le Monde avec une immense admiration pour la prise de distance intellectuelle dont vous avez fait preuve au cœur de cet événement dramatique. Vous avez analysé cette situation comme la conjonction d'un terrorisme fanatique, celui du Hamas, et d'une politique israélienne qui n'était pas satisfaisante. Nous avions ressenti dans cette commission toutes les limites de la politique du premier ministre Benyamin Netanyahou vis-à-vis de la Cisjordanie et du Hamas. Dans un débat public, nous avions dit à quel point l'abandon du processus de paix, l'exploitation des difficultés et des contradictions entre le Hamas et l'Autorité palestinienne, ainsi que l'indifférence aux enjeux de la Cisjordanie conduisaient à une situation où la solution à deux États n'était plus une alternative, puisque personne n'en voulait, mais aussi que rien ne l'avait remplacée, ce qui enfermait les Palestiniens dans une situation très difficile d'absence totale d'avenir collectif.

Cela n'excuse en rien le Hamas pour sa brutalité, ses crimes – je ne sais pas s'il s'agit de crimes de guerre ou de crimes de contre l'humanité –, ses violences insoutenables et inadmissibles. Mais nous sentions bien que la situation était dans une impasse. Vous l'avez dit en tant qu'Israélien ; je crois que vous avez été le premier et nous vous en sommes extrêmement reconnaissants.

Je vous invite tous les trois à vous exprimer, puis les représentants des groupes parlementaires vous poseront des questions auxquelles vous répondrez rapidement.

Cher Élie Barnavi, vous êtes à Tel Aviv au cœur du drame, c'est avec vous que nous allons commencer. Nous vous écoutons avec attention, respect et j'espère un peu d'optimisme pour l'avenir.

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