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Intervention de Eva Sas

Séance en hémicycle du vendredi 20 octobre 2023 à 15h00
Débat sur les finances locales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEva Sas :

Quelle incohérence, monsieur le ministre délégué, dans votre position sur les finances des collectivités locales, et quelle déconnexion !

Incohérence, parce que vous ne cessez de dire que les collectivités doivent financer la transition écologique alors que dans le même temps, vous leur refusez les moyens de le faire. Déconnexion, parce que vous ignorez les difficultés des Français, la pauvreté croissante et le soutien que les collectivités doivent leur apporter au quotidien.

S'agissant de la transition écologique, vous ne prévoyez que 7 milliards d'investissements de l'État sur les 25 à 34 milliards d'investissements publics que le rapport de Selma Mahfouz et Jean Pisani-Ferry estime nécessaires. Vous comptez donc sur un investissement de quelque 20 milliards par an de la part des collectivités territoriales.

Ainsi, dans le domaine des transports, le Président de la République annonce – à grand renfort de communication – le développement de RER métropolitains, mais ne met que 700 millions sur la table alors que le coût global est de 10 à 13 milliards. Ce sont donc les collectivités qui devront payer. Au président les annonces, aux collectivités la facture !

Les collectivités ont besoin de marges de manœuvre pour financer la transition écologique, mais aussi pour faire face à des besoins sociaux de plus en plus aigus. Que dire en effet de la situation des 14 500 centres communaux d'action sociale – CCAS – de France ? Indispensables soutiens des populations les plus fragiles avec leurs accueils sociaux, leurs crèches, leurs Ehpad, ils doivent faire face simultanément à la montée de la pauvreté – 14 % de la population est en situation de privation matérielle et sociale – et à une augmentation de leur masse salariale et de leur facture énergétique, soit plus de 930 000 euros de surcoûts, par exemple, pour le CCAS de Poitiers. Mettre sous contrainte le financement des collectivités, c'est fragiliser encore un peu plus les CCAS, qui sont souvent le dernier recours des populations les plus vulnérables.

Que dire aussi de la prise en charge des sans-abri, pour lesquels les collectivités pallient le plus souvent les carences de l'État, pourtant compétent en matière d'hébergement d'urgence ? Les maires de Bordeaux, Strasbourg, Rennes, Lyon, Paris et d'autres villes vous ont interpellés conjointement la semaine dernière pour que l'État assume enfin la charge qui est la sienne.

Les besoins en matière de transition écologique et d'accompagnement social sont croissants. Les collectivités sont souvent exemplaires et pionnières dans ces deux domaines. Or votre seule obsession est la réduction de leurs moyens.

Vous refusez d'indexer la dotation globale de fonctionnement. Pour une ville comme Besançon, cela représente une baisse de dotation de 1,2 million en euros courants en 2023. Vous remplacez la CVAE par une recette moins dynamique, si bien qu'il manquera aux collectivités près de 650 millions par rapport à ce que cette cotisation leur aurait rapporté. Vous n'accordez que 500 millions au plan de rénovation des écoles, alors que nos enfants étouffent pendant les canicules et que le coût annuel est estimé à 4 milliards. Pour vous donner un exemple parmi d'autres, la rénovation de quatre groupes scolaires à Grenoble nécessite déjà 35 millions. Vous imaginez donc bien que 500 millions ne suffiront pas pour soutenir les collectivités dans cet effort de rénovation.

Enfin, j'aimerais insister sur le financement des transports en commun dans notre pays. Le problème, connu en Île-de-France, est tout aussi grave dans des métropoles comme Aix-Marseille, dont j'évoquais en commission la situation dramatique : l'intervention des gendarmes pour empêcher les usagers de descendre dans le métro les soirs de match, la surcharge du réseau avec deux lignes de métro pour 2 millions de métropolitains et les bus qui s'arrêtent à vingt et une heures. Voilà la réalité des transports en commun dans les métropoles de France ! C'est du quotidien de millions de nos concitoyens que nous parlons ici.

Le Gart, le Groupement des autorités responsables de transport, le rappelait encore il y a quelques jours : « un mur de plus de 100 milliards d'euros de dépenses se dresse devant les AOM, les autorités organisatrices de la mobilité, d'ici à 2030 ». J'ajoute qu'au moment où nous instaurons les ZFE, zone à faibles émissions, nous avons le devoir de développer les transports en commun et d'offrir une solution alternative au véhicule individuel.

Bien que tous ces éléments soient portés à votre connaissance, vous n'acceptez que contraints et forcés d'augmenter de 0,25 point le versement mobilité pour l'Île-de-France, et vous le refusez aux AOM dans les autres régions. Cette rupture d'égalité inacceptable témoigne aussi d'un manque de responsabilité dans la lutte contre le dérèglement climatique.

Pour conclure, je vous appelle solennellement, monsieur le ministre délégué, à laisser aux collectivités les marges de manœuvre fiscales et budgétaires dont elles ont absolument besoin pour protéger les Français, mais aussi pour les accompagner dans la transition écologique. La demande des écologistes est claire : indexation des dotations, déplafonnement du versement mobilité et soutien à la rénovation du bâti scolaire.

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