Intervention de Christine Pires Beaune

Séance en hémicycle du mardi 17 octobre 2023 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2024 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Pires Beaune :

Est-il si difficile de demander un effort exceptionnel, transitoire, à ceux qui peuvent le consentir ? Comment faire accepter des efforts aux Français quand ceux qui pourraient en faire sans dommage sont épargnés ? Pourquoi continuer ainsi à préserver – je dirai même à assister – une infime partie de nos concitoyens, les ultrariches, en les protégeant à tout prix de l'impôt et en refusant de les faire contribuer à hauteur de leurs moyens ?

Des propositions d'économies, monsieur le ministre, nous en avons à la pelle ! Depuis des années, nous vous interpellons sur les niches fiscales et sociales qui privent le budget de notre pays de ressources indispensables pour financer les priorités que j'évoquais plus tôt. Encore faudrait-il nous entendre.

Comment accepter, par exemple, que vous refusiez de plafonner le crédit d'impôt recherche (CIR) alors que les dépenses qui y sont liées sont passées, en huit ans, de 2 milliards à 7 milliards, et même 8 milliards dans le projet de loi de finances pour 2024 ? C'est d'autant plus inacceptable que, on le sait, les résultats ne sont pas au rendez-vous dans les entreprises qui en bénéficient le plus.

Ce n'est pas moi qui le dis : les rapports vous embarrassent, tant ils se multiplient. France Stratégie, Cour des comptes, Conseil des prélèvements obligatoires, rapport sur l'application des lois fiscales : tous aboutissent aux mêmes conclusions ! Mais, par idéologie, vous niez l'évidence.

Selon un autre rapport publié hier par le Comité d'évaluation des réformes de la fiscalité du capital, si l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) avait été maintenu, il aurait rapporté 6,3 milliards d'euros en 2022, alors que les recettes de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) ne se sont élevées l'an dernier qu'à 1,8 milliard, soit un manque à gagner de plus de 4 milliards d'euros pour les caisses de l'État. Si les entreprises sont là pour créer de la richesse, monsieur le ministre délégué, l'État est là pour créer de la justice.

Vous l'aurez compris, nous ne voterons donc pas votre budget, qui est synonyme pour beaucoup de Français appartenant aux classes populaires et moyennes d'efforts surdimensionnés alors que, dans le même temps, vous poursuivez une politique favorable non aux riches, mais aux ultrariches, c'est-à-dire à une toute petite poignée de contribuables.

Votre budget, c'est mission impossible ! Vous vous êtes enferrés dans une double contrainte insoluble. Vous prétendez réduire le déficit à 4,4 % du PIB sans lever de nouvelles recettes fiscales : il en résulte des coupes criminelles, notamment en matière de santé. Ainsi, eu égard aux prévisions d'inflation et surtout aux besoins croissants, la progression de l'Ondam, par exemple, représente bien une mesure d'austérité.

J'insiste, l'obstination à vouloir réduire les prélèvements obligatoires dans le contexte actuel est idéologique et irresponsable. Car si nous pouvons toujours discuter avec le Fonds monétaire international (FMI), avec Bruxelles ou avec les banques centrales, une chose est certaine : nous ne pourrons pas discuter avec la planète. Assumez que la cohésion de la nation est plus importante que tout le reste.

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