Intervention de Félicie Gérard

Séance en hémicycle du jeudi 6 octobre 2022 à 21h30
Charge fiscale de la pension alimentaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFélicie Gérard :

Nous examinons la proposition de loi relative à la charge fiscale de la pension alimentaire, présentée par notre collègue du groupe Modem. Permettez-moi tout d'abord de remercier la rapporteure de cette initiative, puisqu'un sujet primordial est ainsi mis à l'ordre du jour : la situation financière du parent ayant à sa charge l'entretien et l'éducation de l'enfant, en cas de divorce ou de séparation, et percevant donc une pension alimentaire. Peu importe qu'il s'agisse d'un papa ou d'une maman, certains parents se retrouvent dans des situations financières précaires.

Le groupe Horizons et apparentés a souligné en commission les limites du texte, en particulier le recours à l'outil fiscal qui ne nous semble pas le plus adapté pour réduire les inégalités et soutenir un parent en situation financière fragile après une séparation. En effet, en fiscalisant les sommes versées et en cumulant défiscalisation des sommes perçues et bénéfice de parts fiscales, comme le texte le prévoyait initialement, le mécanisme proposé soulèverait une difficulté d'ordre juridique. D'autre part la grande majorité des contribuables percevant une pension alimentaire ne sont pas imposables à l'impôt sur le revenu. La défiscalisation de la pension alimentaire reçue concernerait donc les contribuables qui en ont le moins besoin et le dispositif juridique raterait sa cible principale, les parents isolés les plus précaires.

Le texte a été substantiellement modifié en commission par l'adoption d'un amendement de la rapporteure. L'article 2, concernant la défiscalisation de la pension versée, a été supprimé, et l'article 1er a été profondément remodelé : il prévoit que le parent percevant la pension alimentaire continue à être fiscalisé sur celle-ci, mais qu'il ait la possibilité de la retrancher de son revenu fiscal de référence. Or le RFR a précisément pour but de prendre en compte l'ensemble des revenus d'un foyer fiscal. Le fait d'en extraire la pension alimentaire pourrait créer un précédent dangereux. En effet, pourquoi en exclure cette pension et pas une autre ? En faisant cela, nous remettrions en question le principe même du revenu fiscal de référence, ce qui pourrait aboutir à des situations de forte inégalité dans l'accès aux prestations sociales et aux avantages fiscaux liés au RFR.

Malgré tout, au-delà de ces dispositifs fiscaux, nous comprenons bien évidemment la volonté politique de la rapporteure : mieux soutenir les parents isolés les plus précaires ayant les enfants à charge. Nous partageons pleinement cet objectif politique mais, j'y insiste, le dispositif ici présenté, concentré sur l'outil fiscal, ne nous semble pas être le plus adapté pour répondre à cet enjeu. La proposition de loi ne comprend finalement, comparativement au droit en vigueur, que la déduction des pensions reçues du revenu fiscal de référence. Elle ne modifierait donc le droit qu'à la marge. Face aux doutes sur son efficacité, et compte tenu des risques qu'elle comporte pour le fonctionnement du modèle fiscal, le groupe Horizons et apparentés s'abstiendra.

Avant de conclure, je tiens néanmoins, au nom de mon groupe, à saluer la réflexion et le travail de la rapporteure. Son initiative a permis de remettre au cœur de nos discussions la question du partage des charges et de la participation effective à l'entretien et à l'éducation des enfants en cas de divorce ou de séparation. Nous connaissons tous des parents isolés dont la situation financière est précaire. Nous nous devons de les accompagner au mieux. Il y a indéniablement une réflexion à nourrir pour améliorer efficacement la condition des parents isolés.

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