L'AME est un dispositif nécessaire, humanitaire, de santé publique. Nous avons déjà, collectivement, resserré le panier de soins, à la suite du rapport de l'Igas de 2019. Le nouveau panier permet de prendre en charge les personnes en situation irrégulière, et dans certains cas, les prestations sont conditionnées par une demande d'entente préalable. Je ne peux pas laisser dire qu'il y aurait un tourisme médical développé. Lorsque quelqu'un descend de l'avion et a besoin d'une dialyse, il faut répondre à l'urgence. Un budget est dédié aux soins devant être prodigués dans un délai inférieur à trois mois.
La crise sanitaire a empêché la montée en puissance des mécanismes de contrôle prévus, mais les Cpam, qui ont de plus en plus accès au dispositif Visabio, sont en train de les développer. Les résultats sont là. MM. Claude Évin et Patrick Stefanini, à qui nous avons confié une mission sur ce sujet, devraient nous remettre leur prérapport le 2 novembre et le rapport définitif le 15 janvier prochain. Ces deux personnalités ont des domaines d'expertise complémentaires, la politique migratoire pour le second, le système de santé pour le premier. Ils pourront s'appuyer sur les travaux déjà réalisés et interroger tous les acteurs. Le Gouvernement a la volonté d'évaluer systématiquement les politiques publiques et d'apporter des réponses en cas de nécessité.
Le Gouvernement n'a en tout cas nullement l'intention de supprimer l'AME. Ce serait d'ailleurs aussi, comme l'exemple de l'Allemagne l'a montré, nous priver des indicateurs qui permettent d'évaluer l'accès aux soins et les dépenses afférentes.
Monsieur le rapporteur, vous savez à quel point je suis attachée à ce que nous défendions et appliquions le principe « une seule santé ». L'Institut One Health a ouvert à Lyon. Pour la première fois, une ministre a la santé environnementale dans ses attributions. Nous devons agir ensemble, en amont, sur tous les sujets liés à la qualité de l'air, à la qualité de l'eau, à la transmission potentielle de maladies par des zoonoses... Il faut prévenir le déclenchement de ces maladies. Le concept de One Health doit trouver une traduction concrète dans toutes nos politiques publiques.
Monsieur Martin, comme vous l'avez dit, la proposition de loi visant à instituer un registre national des cancers a été adoptée en première lecture au Sénat. La politique de lutte contre le cancer nous concerne tous : 4 millions de nos concitoyens vivent aujourd'hui, à différents degrés, avec cette maladie. Il faut rappeler combien notre pays est avancé en matière de données de santé. Nous disposons d'atouts considérables. Le cancer est une maladie qui nécessite un suivi et des soins coûteux et prolongés. Tous les patients sont automatiquement considérés comme relevant du régime de l'affection de longue durée (ALD), qui leur permet de bénéficier d'une prise en charge des soins à 100 %. Les données relatives au traitement de chacun d'entre eux sont déjà répertoriées dans le système national des données de santé. L'enjeu est de mieux valoriser ces données. Tel est l'objet de la plateforme des données de santé instituée en 2019, une infrastructure innovante qui facilite le partage et l'analyse croisée des données de santé issues de sources variées – en premier lieu, de la base anonymisée du système national des données de santé. Enfin, l'Inca s'attache avec toute son expertise sanitaire et scientifique à la lutte contre le cancer. Nous suivrons avec attention la suite du parcours de cette proposition de loi.
S'agissant des patients souffrant d'une ALD et n'ayant pas de médecin traitant, le Président de la République a assigné un objectif ambitieux au Gouvernement : faire en sorte qu'un maximum d'en eux puissent obtenir une réponse avant la fin de l'année. L'assurance maladie a écrit à tous les patients concernés. Les communautés professionnelles territoriales de santé et les médecins sont fortement mobilisés, dans chaque territoire. Je ne dispose pas encore de chiffres mais nous savons que leur mobilisation a déjà permis de résoudre un certain nombre de difficultés. Nous avons également constaté, ce qui ne manque pas d'intérêt, que certains de nos concitoyens ne souhaitent pas avoir de médecin traitant.
Monsieur Frappé, vous avez évoqué la réponse aux besoins en matière de santé et les enjeux de l'accompagnement des professionnels de santé. Je vous confirme que nous prenons ces sujets à bras-le-corps : ils constituent notre quotidien.
Monsieur Nilor, s'agissant des enjeux spécifiques des outre-mer, nous apportons des réponses. En matière de prévention, je veux rappeler que la « loi Rist », entrée en vigueur en mai dernier, permet aux pédicures-podologues d'assurer en accès direct le traitement du pied diabétique. Les territoires d'outre-mer répondront sans nul doute présent en matière de sport santé et de développement de l'activité physique adaptée : les médecins la prescriront certainement, comme dans l'Hexagone. Nous serons vigilants sur le développement de l'activité physique adaptée dans ces territoires.
Monsieur Juvin, le développement des soins palliatifs – qui ne relèvent pas, à proprement parler, de la mission Santé – constitue un enjeu majeur. Le Président de la République et la Première ministre nous ont demandé d'apporter des réponses. Le PLFSS prévoit 20 millions d'euros supplémentaires pour entamer la création d'une filière de prise en charge palliative, conformément à l'instruction donnée aux ARS. C'est l'une des premières briques du développement des soins palliatifs.
En ce qui concerne les papillomavirus, la volonté est là. Nous entendons développer la vaccination préventive, qui sera proposée gratuitement dans toutes les classes de cinquième. Nous évaluerons cette campagne dans quelques années. Il a été constaté que lorsque la vaccination est faite très en amont, chez les filles et les garçons, les résultats sont probants.
Nous devons continuer à travailler sur la problématique du covid long. Des études sont menées pour en identifier les causes. Nous serons évidemment au côté des patients.
Concernant l'AME, le tourisme médical n'existe plus. Les demandes d'entente préalable sont nécessaires pour les opérations non urgentes.
Monsieur Falorni, dans le cadre du Ségur de la santé, 19 milliards d'euros sont mobilisés sur dix ans en faveur de l'investissement, dont 13 milliards engagés en novembre 2019, auxquels s'ajoutent 6 milliards sur cinq ans, annoncés dans le cadre du Ségur et intégrés dans le plan France relance de 100 milliards. Ces 6 milliards s'inscrivent dans le cadre du plan national de relance et de résilience. Cet investissement contribuera à concrétiser les priorités de l'Union européenne en matière sociale, environnementale et numérique.
Trois axes sont privilégiés. S'agissant, premièrement, des investissements en faveur des établissements de santé, qui reçoivent 2,5 milliards sur les 6 milliards d'euros de crédits européens, une somme de 1 milliard est destinée au soutien des projets structurants ou prioritaires des établissements de santé. Le versement de ces crédits a été délégué aux agences régionales de santé, qui doivent contractualiser avec les établissements avant la mi-2025. Sur le milliard et demi destiné à soutenir la relance de l'investissement courant des établissements de santé, 982 millions ont déjà fait l'objet d'une contractualisation entre ARS et établissements en 2021 et 2022. Plus de 395 millions ont été versés à plus de 1 600 établissements.
Deuxièmement, sur le milliard et demi affecté à la prise en charge des personnes âgées dépendantes, 280 millions en 2021 et 240 millions en 2022 ont été notifiés aux ARS pour appuyer les projets de restructuration ou de création d'Ehpad. En 2023 et 2024, 465 millions supplémentaires compléteront le dispositif.
Troisièmement, le volet du numérique dans le champ sanitaire et médico-social se voit affecter 2 milliards d'euros – 1,4 milliard pour le champ sanitaire et 0,6 milliard pour le secteur médico-social. Sur cette enveloppe, en 2021, 280 millions ont permis de financer le pilotage et la maîtrise d'œuvre nationale, 493 millions ont été alloués au financement des éditeurs, afin de mettre à la disposition des professionnels de santé des logiciels répondant aux exigences de la feuille de route du numérique en santé, et 191 millions ont été versés aux établissements de santé au titre de l'incitation à l'usage.
M. Peytavie et Mme Rousseau m'ont interrogée sur le PNSE 4. Il y a un lien essentiel entre notre environnement, les écosystèmes et le vivant en général, surtout la santé humaine. Ce constat est au fondement de l'initiative One Health. Les attentes citoyennes à ce sujet sont fortes et en constante progression au cours des dernières années. Ces préoccupations rejoignent désormais celles liées à la précarité sociale et économique.
La santé environnementale est un enjeu de santé publique prioritaire. D'après l'OMS, les facteurs environnementaux sont responsables de près de 20 % de la mortalité en Europe. Il est donc urgent que nous nous penchions sur ce sujet.
La santé environnementale est pleinement intégrée à la stratégie nationale de santé, par le biais de la promotion de conditions de vie et de travail favorables à la santé ainsi que de la maîtrise des risques environnementaux. Elle est aussi au cœur du plan national de santé publique « Priorité prévention ». La déclinaison du PNSE 4, qui fait l'objet d'un suivi par les parlementaires dans le cadre du groupe santé-environnement présidé par Mme Anne-Cécile Violland, est assurée par les ARS selon quatre axes : mieux connaître les impacts de l'environnement sur la santé ; mieux former les professionnels ; renforcer et soutenir la recherche en santé-environnement ; et valoriser les bonnes pratiques.
Sur le bilan des vaccins, s'agissant notamment des exportations, la solidarité française est essentielle. Dans ce domaine comme dans d'autres, la France a su tenir sa place.
Monsieur Valletoux, le sport santé est un enjeu important. À la veille des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et tandis que nous accueillons la Coupe du monde de rugby, l'activité physique, notamment l'activité physique adaptée (APA), est grande cause nationale. Nous avons une opportunité assez extraordinaire de nous mettre en mouvement. Les indicateurs d'obésité et d'entrée précoce dans des pathologies chroniques parmi les jeunes doivent nous faire prendre conscience que la prescription de l'APA est un enjeu majeur.
Le PLFSS 2024 apporte une première réponse, sous la forme d'une expérimentation du forfait multi-acteurs selon les dispositions de l'article 51 de la LFSS 2018. Comme j'ai eu l'occasion de le dire à certains d'entre vous la semaine dernière dans le cadre du comité de suivi du Ségur, nous travaillons à une modélisation du coût, dans le cadre du droit commun, de l'APA pour certaines pathologies. Cela prend du temps, mais la volonté est là. J'ai constaté la semaine dernière, lors d'un déplacement près d'Angers, que les collectivités locales sont des acteurs essentiels et importants du développement de l'APA.
La nutrition est un enjeu majeur. Le nutri-score est recommandé par les autorités françaises depuis octobre 2017. Début 2021, sept pays européens – l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne, la France, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Suisse – l'avaient adopté. Afin d'en coordonner l'application, nous avons créé un comité de pilotage et un comité scientifique indépendant. Son nouvel algorithme de calcul entrera en application en 2024. Une fois la réglementation française révisée, une période de deux ans sera laissée aux opérateurs afin d'assurer une transition dans des délais optimaux pour tous.
Madame Rousseau, je laisse mes collègues MM. Rousseau et Cazenave ainsi que Mme Bergé, qui seront auditionnés demain par cette commission, vous répondre sur le PLFSS 2024.
La prise de conscience que la santé environnementale est un enjeu de santé publique et que la santé est un tout est réelle. Le retour d'expérience de la crise du covid nous en a sans doute fait prendre conscience de cette notion de One Health. Nous devons intégrer les enjeux de santé environnementale dans les politiques publiques. Par ailleurs, le secteur de la santé représente 8 % de nos émissions de gaz à effet de serre : les politiques publiques doivent l'engager dans une planification écologique, à laquelle nous travaillons.
En cette journée mondiale de la santé mentale, M. Dharréville a évoqué le sujet, sur lequel j'ai aussi été interrogée tout à l'heure lors de la séance de questions au Gouvernement. Les crédits du programme 204, loin de diminuer, sont en augmentation : ce sont bien les crédits du programme 379, lié au covid, dont la phase épidémique est heureusement passée, qui s'amenuisent.
Monsieur Colombani, vous m'avez interrogée sur le coefficient géographique. Le ministre de la santé et de la prévention a pris la semaine dernière l'engagement de travailler à la réponse que nous devons aux élus de Corse et d'outre-mer à ce sujet. Je vous transmettrai ultérieurement les réponses à vos deux questions sur la prévention.
S'agissant de l'AME, la question ne surgit pas parce qu'il est question du PLF 2024, mais dans l'attente du projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration qui va venir. Le Gouvernement a confié à MM. Claude Évin et Patrick Stefanini une mission visant à évaluer cette politique publique, qui l'a déjà été en 2019 par l'Igas. Il n'a nullement l'intention de supprimer l'AME, ce qui serait une grave erreur.
Madame Louwagie, j'ai pris note de votre satisfecit sur la politique d'accompagnement des victimes de la Dépakine. Les courriers ont été envoyés en août 2023. La question de savoir s'il est possible d'ouvrir un fichier des pathologies est une question de droit, qui fait partie du champ de la mission confiée à MM. Évin et Stefanini.