Le prix des factures d'électricité et de gaz devient insupportable : il est temps d'agir. Pour protéger les particuliers, les entreprises et les collectivités, j'ai l'honneur de défendre cette proposition de loi au nom du groupe Rassemblement national.
L'explosion des tarifs de l'énergie survenue depuis la fin de l'année 2021 s'inscrit dans une hausse continue depuis la libéralisation du marché de l'énergie en France. La crise inflationniste que nous subissons est révélatrice d'un triple renoncement de nos dirigeants : renoncement à protéger les Français et nos entreprises ; renoncement à défendre notre souveraineté énergétique et notre puissance industrielle ; renoncement à soutenir les intérêts nationaux face aux règles absurdes de l'Union européenne – lesquelles ont été imposées, il faut le rappeler, avec la complicité des gouvernements successifs.
Avant la libéralisation du marché français de l'énergie, le monopole d'EDF garantissait un réseau de qualité, une énergie abondante et des prix attractifs. Les tarifs bleu, jaune et vert d'EDF assuraient la bonne information du consommateur et lui faisaient bénéficier de prix parmi les plus bas d'Europe. Ces prix couvraient les coûts de production, de maintenance et d'investissement du système électrique français. Ils reposaient sur la réalité économique d'un mix électrique fondé sur l'alliance du nucléaire et de l'hydraulique. Ils étaient un atout pour le bien-être des Français et la compétitivité de nos entreprises, et étaient enviés dans le monde entier.
Le modèle électrique français démontrait donc son efficacité avant que l'Union européenne ne le saccage. La libéralisation du marché français de l'énergie a conduit à démanteler EDF-GDF pour faire émerger une concurrence artificielle qui prospère sur la rente nucléaire d'EDF, par le dispositif de l'Arenh (accès régulé à l'électricité nucléaire historique). Cette libéralisation a conduit à indexer les prix de l'électricité sur ceux du gaz à l'échelon européen et à éteindre progressivement les tarifs réglementés.
Le système énergétique français a été défiguré au nom des dogmes européens de la concurrence, laquelle devait bénéficier aux consommateurs en faisant émerger des fournisseurs alternatifs à EDF. Le bilan est pourtant sans appel : les consommateurs sont pénalisés et l'offre d'électricité frôle la pénurie dans notre pays.
Depuis la libéralisation du marché français de l'énergie, les prix ont explosé. Entre 2007 et 2022, les prix de l'électricité ont bondi, en euros courants, de 81 % pour les ménages et de 110 % pour les entreprises, et ceux du gaz de 81 % pour les ménages et de 135 % pour les entreprises. Et je ne parle pas de la hausse des tarifs énergétiques depuis début 2023.
Les consommateurs sont d'autant plus pénalisés que les tarifs réglementés de vente (TRV) ont été supprimés le 1er juillet dernier pour le gaz, et restreints pour l'électricité aux seuls particuliers et très petites entreprises. Les tarifs réglementés de vente d'électricité (TRVE) sont d'ailleurs en sursis face à la nécessité de se conformer aux dogmes européens. La promesse théorique selon laquelle le principe de concurrence profite au consommateur, par la baisse des prix, se heurte au réel sur le marché de l'énergie, comme en témoigne l'inflation actuelle.
Par dogmatisme, pour permettre à la concurrence de se développer, les TRVE ont été renchéris artificiellement et se sont éloignés progressivement des coûts de production d'EDF. L'Arenh est un mécanisme bureaucratique qui contraint EDF à brader 25 % de sa production électronucléaire à ses concurrents directs, à un prix qui ne couvre même pas ses coûts de production.
Après une douzaine d'années d'application de l'Arenh, non seulement les fournisseurs alternatifs n'ont pas investi dans des moyens de production, mais EDF a été lourdement pénalisée par ces milliards d'euros annuels de manque à gagner. Avec 65 milliards de dette, comment voulez-vous qu'EDF investisse massivement dans de nouveaux moyens de production ?
« Poison », « monstruosité », « pernicieux », « pilule empoisonnée » : voilà quelques-uns des termes employés par d'anciens PDG d'EDF à propos de l'Arenh, lors des auditions réalisées par la commission d'enquête parlementaire sur les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la France. L'Arenh a affaibli EDF, a fait augmenter les tarifs de l'électricité et a mis en péril la sécurité d'approvisionnement électrique du pays en paralysant les investissements des énergéticiens.
La fin de ce dispositif est prévue par la loi au 31 décembre 2025, mais les motifs que je viens d'énumérer nous appellent à la responsabilité : il nous faut accélérer sa suppression. Les conclusions du rapport de la commission d'enquête sur la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la France sont claires. Dans sa proposition 7, le rapporteur, M. Armand – député Renaissance – appelle à « suspendre sans délai et compenser l'Arenh ». C'est l'objet de la présente proposition de loi.
Aux règles bureaucratiques de l'Arenh s'ajoutent celles du marché européen de l'énergie, qui renchérissent injustement le prix de l'électricité. Ce dernier est en effet corrélé au prix du gaz, non seulement en raison de la tarification au coût marginal de la dernière unité de production appelée sur le marché européen, mais aussi compte tenu de la nécessité de compenser la priorité donnée aux énergies intermittentes avec des centrales à énergies fossiles, notamment au gaz.
Ce système est donc une aberration. Par le système européen de fixation des prix de l'énergie, le Gouvernement inflige une triple peine aux Français.
Premièrement, nos compatriotes ont payé par le passé pour se doter d'un parc nucléaire capable de produire de l'électricité à bas coût et en quantité suffisante en cas de crise, notamment avec l'apport de l'hydraulique.
Deuxièmement, les Français n'obtiennent pas de juste retour sur cet investissement car, du fait de l'indexation du prix de l'électricité sur celui du gaz, ils paient leur énergie à un niveau plus élevé que le coût de production en France – ce, afin de compenser les mauvaises politiques énergétiques de l'Allemagne.
Enfin, pour atténuer les prix gonflés artificiellement par les règles européennes et l'Arenh, les Français payent une troisième fois en finançant par leurs impôts un bouclier tarifaire dont le coût est estimé à 110 milliards d'euros entre 2021 et 2023.
Ce système est aussi absurde qu'injuste. Il est temps d'y mettre fin. Arrêtons de dilapider l'impôt des Français et rapprochons enfin les factures énergétiques des coûts de production en France.
La proposition de loi contient deux articles destinés à réduire les factures énergétiques. Dans le premier, nous proposons d'avancer l'abrogation de l'Arenh au 1er janvier 2024 et de rétablir un système français de fixation des prix de l'énergie, notamment de l'électricité. Nous voulons rétablir les TRVE pour tous les consommateurs, domestiques ou non. Le calcul de ces tarifs devra se rapprocher des coûts de production en France. Ces dispositions assureront d'une part la baisse massive des factures d'électricité, et d'autre part la lisibilité des offres, la visibilité des prix et l'attractivité des tarifs pour l'ensemble des consommateurs.
Dans un second article, nous demandons le rétablissement des tarifs réglementés de vente du gaz naturel et proposons un mode de calcul qui permettra d'en lisser les montants dans le temps, pour protéger les consommateurs face aux fluctuations d'un marché particulièrement volatil – le gaz étant une énergie essentiellement importée.
L'énergie constitue le moteur de notre économie et un produit de première nécessité pour les ménages ; elle revêt donc un intérêt stratégique pour la nation. C'est pourquoi nous proposons des prix de l'électricité et du gaz administrés par l'État, proches des réalités économiques, plutôt que fixés par des règles européennes absurdes et un dispositif bureaucratique inefficace tel que l'Arenh.
Pour défendre le pouvoir d'achat des particuliers et la compétitivité de nos entreprises, il faut faire en sorte que le montant des factures ne soit plus dicté par des règles dont chacun a pu constater l'inefficacité. Je vous invite à soutenir cette proposition de loi, qui constitue une première étape dans la reprise en main de notre souveraineté énergétique. Cela serait un beau symbole alors que l'on célèbre aujourd'hui le soixante-cinquième anniversaire de la promulgation de la Constitution de la Ve République.