Lors de son premier passage en commission nous avions déjà félicité le rapporteur pour son travail transpartisan et apporté nos voix à ce texte, qui vient combler un vide juridique et protéger le droit à l'image en ligne des plus jeunes.
Nous approuvons les modifications apportées par le Sénat. Nous saluons la suppression de l'article 4, que nous avions également demandée, car il nous paraît disproportionné et confus de retirer l'autorité parentale pour des faits de gravité très variable. Nous en remettre au cas par cas au juge des enfants, c'est faire confiance à la justice et respecter le principe de proportionnalité des peines. Nous approuvons également le nouvel article 5, qui permet de saisir la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) : nous avions déposé un amendement similaire, mais il avait été considéré comme un cavalier législatif. Je constate que le Sénat ne fait pas la même lecture de l'article 45 de la Constitution.
Nous votons ce texte, mais nous ne sautons pas au plafond de joie. Sur un sujet aussi précis, trouver un accord est possible mais, le projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique le montre, nos approches de la régulation numérique diffèrent : nous préférons préserver la liberté des utilisateurs, vous, celle des entreprises ; vous préférez sanctionner les comportements individuels, nous les plateformes qui les rendent possibles.
Cette proposition de loi peine à faire oublier la dégradation des droits des enfants en France. Oui, ce texte, qui se veut avant tout pédagogique, permet une avancée. Mais, en matière de droit des enfants, le Gouvernement a des marges de progression ! Alors que Macron a annoncé que la protection de l'enfant serait l'autre grande cause de son quinquennat, la situation est inquiétante : comme pour les droits des femmes, vous préférez le paraître aux mesures concrètes.
Qui reste-t-il alors pour protéger et faire de la pédagogie ? Les professionnels des crèches sont à bout de souffle. À l'école, la pénurie de professeurs reste sans solution – les syndicats estiment qu'il manque au moins un enseignant dans 48 % des collèges et lycées. Comment des enseignants pourraient-ils alors trouver le temps de sensibiliser leurs élèves et déceler les cas de harcèlement toujours plus grave ? Les professionnels de la protection de l'enfance sont en sous-effectif et leurs revendications sur le nombre de places dans les structures d'accueil et sur les postes vacants restent, là aussi, sans réponse. La crise de la pédiatrie et des services périnataux continue, et la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) risque de voir ses travaux clos dès le mois de décembre.
Je vous alerte : une approche plurielle est plus que jamais nécessaire pour garantir aux enfants l'intégralité de leurs droits, à commencer par les plus fondamentaux. Trois millions d'enfants vivent dans notre pays sous le seuil de pauvreté, soit un sur cinq. Le droit à une vie digne pour nos petits devrait nous unir autant que le droit à la protection de leur image. Mais lutter contre les inégalités sociales vous refroidit, car il faut sortir le carnet de chèques ; vous protégez toujours avec plus d'ardeur la hiérarchie sociale que les droits humains. Les travaux de la Ciivise, qui a permis une libération de la parole, doivent être prolongés.
Vous nous permettez de voter pour protéger l'image des enfants et c'est une bonne nouvelle. Mais je vous promets qu'en 2027, quand la NUPES sera au Gouvernement, nous protégerons les enfants, tout simplement.