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Intervention de Marine Tondelier

Réunion du jeudi 7 septembre 2023 à 14h00
Commission d'enquête sur la structuration, le financement, les moyens et les modalités d'action des groupuscules auteurs de violences à l'occasion des manifestations et rassemblements intervenus entre le 16 mars et le 3 mai 2023, ainsi que sur le déroulement de ces manifestations et rassemblements

Marine Tondelier, secrétaire nationale d'Europe Écologie-Les Verts :

Ce n'est pas moi qui ai rédigé le tract auquel vous faites allusion, mais j'en ai compris la raison sur place. Plusieurs blessés m'ont expliqué qu'ils ne voulaient pas être hospitalisés dans la région parce qu'en octobre 2022, certains manifestants, dont l'un avait reçu un tir de lanceur de balles de défense à la tête, avaient été placés en garde à vue à l'hôpital. La police était venue y faire des perquisitions. Elle avait obtenu la liste des blessés et, dans une violation totale du secret médical qui a choqué le personnel soignant, elle avait demandé à ce dernier quelles blessures étaient susceptibles de provenir de Sainte-Soline. Ce pouvait être le cas, par exemple, d'éclats aux membres inférieurs causés par des grenades.

Les effets personnels des blessés hospitalisés avaient été passés au détecteur de marqueurs chimiques, des substances projetées sur les manifestants qui, sous une lampe torche, produisent une couleur. Les policiers estimaient qu'il était légitime de recourir à cette technique, utilisée pour la première fois à l'occasion de cette manifestation qui, vous l'avez souligné, était interdite. Compte tenu de la panique générale, on ne saura évidemment jamais quel membre des forces de l'ordre a blessé quelle personne, d'autant que les agents ne portaient pas leur numéro de référentiel des identités et de l'organisation (RIO) et que, dans le cas contraire, il n'était pas visible à distance. Mais la seule présence de produit marquant sur les affaires d'un individu suffit à prouver sa participation à la manifestation interdite et à le faire condamner pour ce motif.

C'est pour cette raison qu'il y a, chez les manifestants, une grande défiance. Je ne justifie rien : je vous explique pourquoi les organisateurs ont conseillé aux blessés de ne pas se rendre dans les hôpitaux du coin. La préfète affirme que tout est de la faute des organisateurs. Mais elle ne bénéficie d'aucune exonération. Quel que soit le comportement de Julien Le Guet, l'assistance aux blessés est un principe du droit international, y compris en cas de conflit armé. L'article 2 de la Convention européenne des droits de l'homme énonce, pour les États, une obligation positive qui s'applique même aux personnes arrêtées ou détenues. Quant à l'article 8 du deuxième protocole aux conventions de Genève relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux, il stipule : « Chaque fois que les circonstances le permettront, et notamment après un engagement, toutes les mesures possibles seront prises sans retard pour rechercher et recueillir les blessés, les malades et les naufragés, les protéger contre le pillage et les mauvais traitements et leur assurer les soins appropriés, ainsi que pour rechercher les morts, empêcher qu'ils soient dépouillés et leur rendre les derniers devoirs. »

Pour ma part, je n'ai été en contact qu'avec la préfète et la gendarmerie. La nuit suivante, alors que je rentrais en train en compagnie de David Cormand, j'ai rédigé un compte rendu de nos échanges pour être sûre de ne rien oublier. J'ai repris mon journal d'appels et relevé tous les horaires, parce que je savais qu'il y aurait des enquêtes et que je voulais dire la vérité. Dès le lendemain, j'ai envoyé ce document aux services de la Première ministre, au directeur de cabinet de Gérald Darmanin, à la presse et aux organisateurs de la manifestation en précisant qu'il s'agissait de ma vision, laquelle ne pouvait pas être généralisée à l'ensemble du site.

Ainsi, nous avons discuté avec les autorités pour faire venir les secours officiels et emmener à l'hôpital les personnes que nous assistions. La Ligue des droits de l'homme a appelé le Samu, qui a répondu qu'il ne pouvait pas venir et qu'il attendait un ordre qui tardait à arriver. Or, après l'intervention des quads à treize heures cinquante-trois, il y a eu une trêve entre quatorze heures huit et quinze heures huit. Notre déroulé et celui de la Ligue concordent sur ce point. Pendant une heure, aucun incident ne s'est produit et Serge, le blessé grave, a attendu, entre la vie et la mort, qu'on laisse passer les pompiers bloqués par les forces de l'ordre. Ces dernières ne faisaient qu'appliquer une consigne. La situation était évidemment difficile pour la préfète, qui ne m'a pas semblée complètement insensible aux événements. Mais elle craignait que les affrontements reprennent et elle a donc attendu longtemps avant de donner l'ordre que nous attendions. Toujours est-il que c'est d'elle qu'est venu la consigne et que c'est sa responsabilité qui est en cause, non celle des organisateurs.

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