La CGT répond à votre convocation, comme elle le fait toujours lorsqu'elle est sollicitée par nos institutions républicaines afin de contribuer au débat et à l'action du législateur. Toutefois, je souhaite faire part de mes interrogations.
Tout d'abord, je suis surprise de l'insistance dont vous avez fait preuve pour entendre nominativement les premiers dirigeants des organisations syndicales. De plus, vos secrétariats nous ont rappelé d'une manière virulente le risque d'une amende de 7 500 euros et de deux ans d'emprisonnement en cas de non-présentation. Cela nous a semblé quelque peu baroque, dès lors que nous vous avions immédiatement assuré être à votre disposition pour répondre à vos questions techniques. Nous avions proposé que l'administrateur de la CGT chargé de ces questions, Laurent Brun, se présente devant vous, outre notre responsable de l'animation des luttes et sécurité (ALS), Sylvain Bernard, ici présent. Nous sommes là mais, comme vous le savez, la rentrée est chargée avec de nombreuses négociations – Association générale des institutions de retraite des cadres, Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (Agirc-Arrco), assurance chômage, pénibilité – et de nombreuses luttes en cours autour de la question des salaires, alors qu'un tiers des Français renonce à faire trois repas par jour. Nous aurions volontiers échangé avec les parlementaires sur ces sujets qui relèvent davantage des secrétaires généraux de nos organisations.
Quant aux objectifs de votre commission d'enquête, nous sommes des organisations syndicales qui appelons les salariés et les retraités à manifester en nombre. Nous ne sommes absolument pas concernés par les groupuscules dont la gestion, y compris s'agissant de la sécurisation de la voie publique, incombe d'abord aux pouvoirs publics.
En ce qui concerne les questionnaires qui nous ont été adressés, la CGT a constaté bénéficier de quelques questions en bonus à propos de luttes décidées et organisées par les salariés eux-mêmes dans certains secteurs – celui de l'énergie par exemple. Nous comptez-vous donc parmi les groupuscules, alors que l'ensemble des organisations syndicales a plus d'adhérents que l'ensemble des organisations politiques ?
Enfin, le périmètre temporel de la commission d'enquête s'étend du 16 mars au 3 mai alors que notre mobilisation a commencé le 19 janvier. Le 16 mars, c'est le jour où la Première ministre a engagé la responsabilité du Gouvernement au titre de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution. Nous avons exhorté le Président de la République à laisser le Parlement voter car, comme nous l'avions dit et répété, l'utilisation de cette disposition constitutionnelle face à une telle mobilisation sociale ne pouvait que susciter la colère. Nous avons condamné cette colère, mais elle ne saurait être dissociée de ce passage en force contre le Parlement, qui s'est d'ailleurs accompagné d'une augmentation de la répression dénoncée par la commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe.