Personne ne pourra nier la nécessité de légiférer face à l'attente forte dans nos territoires et l'enjeu écologique auquel nous sommes confrontés. Il n'est plus acceptable de laisser l'engrillagement se développer en Sologne, ni même de prendre le risque de son extension. Il résulte parfois de pratiques purement cynégétiques ou relève de la protection de la propriété privée. Quoi qu'il en soit, ces pratiques doivent être régulées.
Je le précise d'emblée, le texte prend en compte les exemptions indispensables, notamment pour la sécurité publique ou le développement écologique de nos territoires. Les clôtures nécessaires à la protection des routes ou des voies ferrées, à la régénération forestière ou encore aux activités agricoles, ne sont évidemment pas concernées par la proposition de loi. Ce que les sénateurs et les députés ont cherché à faire, et que le Gouvernement soutient, c'est à diminuer les conséquences de cette pratique sur les paysages.
L'impact écologique, pour commencer : il se traduit par des ruptures de continuité alors même que nous avons besoin de plus de fluidité. Dans un contexte de changement climatique et d'atteinte aux habitats naturels, il est essentiel que les espèces se déplacent sans contrainte.
En Sologne, particulièrement, les espaces sont malheureusement devenus au fil des années bien trop fragmentés, ce qui emporte aussi des conséquences sanitaires : la maladie de Lyme, par exemple, se développe davantage dans des espaces divisés.
C'est tout l'objet de l'article 1er qui a vocation à garantir la continuité écologique entre les propriétés. Ainsi les clôtures ne pourront plus être hermétiques et devront désormais laisser passer les animaux. Nous allons par ailleurs nous appuyer sur la notion de zones naturelles qui présente l'avantage d'être clairement identifiée au plan local d'urbanisme (PLU), tout en épargnant les zones agricoles.
La présente proposition de loi doit également rendre leur beauté aux paysages. Les clôtures défigurent nos campagnes. C'est ce qui incite les élus comme les citoyens à se mobiliser. Je remercie tous ceux qui se sont emparés du sujet, pour le faire connaître et le documenter.
Le troisième impact porte sur la capacité à lutter contre les incendies car l'engrillagement entrave la circulation des engins de secours. Nous l'avons constaté cet été lors des incendies survenus en Gironde comme en Bretagne ; le risque d'incendies augmente partout sur le territoire et touche des régions traditionnellement épargnées. Nous devons donc mieux adapter nos forêts à ce risque en veillant à ce que les engins puissent accéder à ces zones. Or les clôtures ne font qu'en compliquer l'accès.
Ce texte aborde le sujet de l'engrillagement, qui empêche la circulation des animaux sauvages. Il répond, en ce sens, à certaines des critiques qui visent la chasse en enclos et nous appelle sans doute à aller plus loin, en incitant notamment les établissements concernés à adopter des pratiques différentes.
Nous l'avons compris lors des discussions en commission et à la lecture des amendements que vous avez déposés, la date de 2005 fait débat. Elle constitue une accroche intéressante du point de vue juridique car elle a introduit l'autorisation de chasser en tout temps et en tout lieu dans les enclos, poussant les propriétaires à s'engrillager plus encore. Vos débats ont toutefois souligné qu'elle semble une référence encore trop récente pour avoir une efficacité qui satisferait les acteurs locaux. Nous y reviendrons pendant cette séance.
L'idée de faire débuter l'obligation de réaménagement des clôtures en se référant à trente ans en arrière présente un double avantage : elle paraît plus efficace dans le temps pour mettre fin à cet état de fait qu'est l'engrillagement ; et, en se fondant sur la prescription trentenaire en matière de droit à la propriété, elle répond aux exigences du Conseil constitutionnel. En contrepartie, l'article 4 donne la possibilité aux propriétaires de mobiliser l'écocontribution pour financer des barrières respectueuses du passage des animaux à la place des grillages.
J'ai également compris des débats au Sénat comme à l'Assemblée nationale que l'article 2 constituait un point sensible de la proposition de loi. D'un côté, les intrusions volontaires caractérisées doivent être sanctionnées. De l'autre, il apparaît difficilement justifiable de sanctionner d'une contravention de classe cinq les intrusions, particulièrement si elles sont involontaires, alors que ce dispositif s'appliquera sur tout le territoire. Au cours de pratiques de loisirs, on ignore parfois que l'on se situe sur un terrain privé, les démarcations en forêt, à différents endroits du territoire, n'étant pas toujours clairement matérialisées. Nous devons en tenir compte.
La proposition de loi a aussi des conséquences sur la prévention des dégâts agricoles et forestiers. En effet, nous allons ouvrir des propriétés sur lesquelles vit du grand gibier qui, lorsqu'il est en surabondance, cause des dégâts, menace la régénération des forêts et peut être porteur de maladies infectieuses. L'enlèvement des grillages ne doit pas accentuer ces problèmes en périphérie des espaces concernés. Nous devrons y être vigilants.
C'est dans cet esprit que je souhaite publier prochainement un décret – qui est en préparation de longue date – renforçant l'obligation de respecter une densité maximale de sangliers dans les enclos.