Je suis heureux de présenter le PLF pour 2024, avec Bruno Le Maire, à la commission des finances de l'Assemblée nationale. Ce budget est le résultat d'une méthode, celle du dialogue, d'un esprit, celui de la responsabilité, et d'une boussole, agir pour l'avenir.
D'abord, le projet de loi de finances pour 2024 confère une priorité absolue à la transition écologique. En effet, outre la dette financière, nous avons une dette écologique. Dans le cadre de la stratégie de planification, le texte prévoit d'investir 10 milliards d'euros supplémentaires, avec une hausse de 7 milliards des crédits de paiement en 2024.
Concrètement, nous permettrons la construction de RER métropolitains ; nous engagerons des rénovations thermiques de bâtiments, avec une participation de l'État de 550 millions d'euros ; nous encouragerons la mise en œuvre du plan « haies », en allouant 110 millions d'engagements; pour décarboner le chauffage des entreprises et des ménages, le fonds Chaleur bénéficiera de 300 millions d'euros supplémentaires ; pour les collectivités, nous pérennisons le fonds vert, à hauteur de 2,5 milliards, dont 500 millions seront consacrés à rénover les écoles, comme le Président de la République l'a annoncé.
Par ailleurs, nous inciterons tous les acteurs à s'engager en faveur de la transition écologique, en créant un crédit d'impôt au titre des investissements en faveur de l'industrie verte et en renforçant les malus automobiles pour les véhicules les plus polluants.
Nous cherchons à amplifier l'effort de tous les leviers de financement, en dotant le futur plan d'épargne avenir climat d'un régime fiscal incitatif et en mettant à contribution les gestionnaires des infrastructures de transport les plus émetteurs pour financer le ferroviaire.
L'année 2024 constitue la première étape pour tenir un engagement à long terme. Lundi, lors de l'examen en commission des finances du PLPFP, nous avons émis un avis favorable à un amendement qui prévoit l'établissement d'une stratégie pluriannuelle des financements de la transition écologique. Cet amendement rejoint plusieurs amendements qui ont été déposés par l'opposition, et ce n'est pas une surprise. Cette demande de visibilité pluriannuelle a en effet été exprimée par presque tous les groupes à l'occasion des dialogues de Bercy.
Les collectivités territoriales ont aussi un rôle majeur à jouer. Nous travaillons avec les associations d'élus pour généraliser les budgets verts. L'enjeu est de nous doter d'une boussole commune. Là encore, je suis certain que le débat parlementaire permettra d'enrichir le texte.
Le budget de 2024 tend également à réarmer les services publics, garants de notre cohésion nationale. L'augmentation se monte à plus de 3,9 milliards d'euros pour l'éducation nationale ; 1 milliard pour la recherche et l'enseignement supérieur ; 3,3 milliards pour les armées ; 1 milliard pour le ministère de l'intérieur ; 500 millions pour la justice. Grâce à ces financements, nous améliorerons la rémunération des enseignants, nous poursuivrons les investissements en matériel prévus dans la loi de programmation militaire, nous équiperons mieux les policiers.
Au-delà des chiffres, le service public est constitué de femmes et d'hommes. Le PLF pour 2024 permettra à l'État de recruter près de 6 700 agents publics supplémentaires et aux opérateurs de l'État d'en embaucher 1 580. Nous créerons en 2024 notamment 3 000 postes d'AESH (accompagnant d'élèves en situation de handicap) ; 1 900 postes dans la justice ; la police bénéficiera de 2 600 membres supplémentaires et le ministère de la transition écologique et ses opérateurs de 700 agents de plus. S'il en était besoin, ces créations démentent ceux qui nous reprochent d'avoir délaissé nos services publics : rien n'est plus faux.
Enfin, qu'on arrête d'opposer l'État et les collectivités. Nous soutenons ensemble les services publics : les concours financiers aux collectivités s'élèveront à 54,8 milliards en 2024, et la dotation globale de fonctionnement (DGF) augmentera à nouveau de 220 millions d'euros, après avoir connu en 2023 sa première hausse depuis douze ans.
Nous avons par ailleurs décidé d'étendre le fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) aux dépenses d'aménagement. Cela répond à une demande des élus locaux, et représente un effort supplémentaire de 250 millions.
Mais l'appui que nous offrons aux collectivités territoriales doit aller de pair avec la réduction du coût des doublons entre l'État, les opérateurs et les collectivités, et avec la réduction du coût des normes. Nous lancerons prochainement une grande mission sur la question, pour alimenter des pistes de réformes structurelles.
Les grands équilibres de ce projet de loi de finances ont un cap clair, rappelé par Bruno Le Maire : réduire nos déficits publics. Investir pour l'avenir, c'est maîtriser nos comptes publics. Si l'État a pu protéger, c'est qu'il avait réduit son déficit en 2018 à 2,3 %. Un État qui consacre plus aux intérêts de la dette qu'au budget de l'éducation nationale, ce qui sera le cas en 2027, ne peut plus prétendre être tourné vers l'avenir.
Les dépenses de l'État passeront de 496 à 491 milliards, une baisse historique, qui s'explique d'abord par la sortie des dispositifs de crise. Les mesures exceptionnelles instaurées pendant la crise énergétique ne sont pas éternelles. Nous n'en avons pas les moyens. Nous devons sortir progressivement de ces dispositifs de crise qui pèsent sur nos finances publiques. Sur les mesures exceptionnelles, nous dépenserons 14 milliards de moins en 2024 qu'en 2023.
Dans le même temps, nous devons continuer à lutter contre la vie chère et redonner du pouvoir d'achat aux Français. C'est pour protéger les Français que nous revalorisons les tranches du barème de l'impôt sur le revenu, les pensions, les minima sociaux, pour un équivalent de 25 milliards. C'est un véritable bouclier contre l'inflation.
Les économies sur le budget viennent aussi des réformes structurelles. Nous réaliserons 350 millions d'économies sur les dépenses en faveur de l'emploi, en cohérence avec la baisse du chômage, ainsi qu'un peu plus de 500 millions en améliorant l'efficience de la politique de formation professionnelle.
Le déficit budgétaire passera ainsi de 165 à 145 milliards : nous atteindrons la cible des 4,4 % de solde public en 2024. Nous poursuivons de manière méthodique le redressement progressif de nos comptes publics, et nous devrons continuer sur cette lancée dans les prochaines années. Notre trajectoire prévoit que nous fassions 12 milliards d'économies en 2025. C'est un effort très important et c'est dans ce cadre que nous relançons les revues de dépenses.
Ce PLF est aussi un PLF antifraude. Avant d'être un enjeu financier, la lutte contre la fraude est un enjeu de cohésion et de justice sociale. Il n'y a pas de consentement à l'impôt si on ne peut garantir que tous ceux qui doivent payer des impôts les paient effectivement.
Le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) instaurent une dizaine d'outils juridiques supplémentaires pour mieux lutter contre la fraude. Par exemple, face à la nouvelle donne numérique, nos administrations pourront différencier sur les plateformes numériques les vendeurs qui ne respectent pas leurs obligations fiscales ou permettre à nos agents de mener des cyberenquêtes sous pseudonyme.
Nous lutterons contre ceux qui achètent à l'étranger sur internet et revendent en France sans payer la TVA. Nous créerons une peine complémentaire de privation du bénéfice des crédits et réductions d'impôts pour les particuliers condamnés pour fraude fiscale. Nous instaurerons un nouveau délit d'incitation à la fraude fiscale, afin de poursuivre tous les intermédiaires qui proposent des montages d'évasion fiscale, sans attendre la condamnation de leurs clients. C'est une manière d'empêcher la fraude à la source pour ceux qui la vendent. Ce délit concernera aussi les personnes qui promeuvent la fraude aux aides sociales, comme l'a fait récemment un youtubeur.
Nous créerons une sanction administrative pour lutter contre la fraude aux aides publiques et mettrons en place dans le PLFSS le précompte des cotisations des travailleurs des plateformes, pour leur créer des droits et éviter la fraude.
Enfin, nous renforcerons l'arsenal pour mieux contrôler les arrêts maladie.
Parallèlement à la création de 1 500 emplois au sein du contrôle fiscal à Bercy, d'ici à 2027, 1 000 agents supplémentaires chargés de la lutte contre la fraude rejoindront les caisses. Nous devons renforcer la sécurité de nos agents qui effectuent les contrôles en permettant la délocalisation de certains contrôles et en assouplissant la procédure d'anonymisation des contrôles. C'est une évolution essentielle, après le drame que nous avons connu l'an dernier.
Voilà les mesures que nous proposons dans le texte initial, mais nous sommes prêts à l'enrichir. La plupart des participants aux dialogues de Bercy ont évoqué la lutte contre la fraude. Certains ont proposé de pérenniser le dispositif des aviseurs fiscaux, auquel nous sommes très favorables.
Enfin, ce PLF est une méthode, celle du dialogue. J'y suis très attaché. C'est pourquoi, depuis mon arrivée, j'ai réuni les parlementaires de tous bords, lors des dialogues de Bercy ou de réunions bilatérales. Ces échanges ont permis d'identifier des questions pour un travail commun. C'est aussi ce qui a permis, lors de l'examen du projet de loi de programmation des finances publiques (LPFP), d'émettre un avis favorable à une quinzaine d'amendements, de la majorité et des oppositions. Cette méthode de dialogue, éprouvée avec vous, vaut avec tous. C'est aussi main dans la main, avec les collectivités territoriales que nous avons travaillé sur ce budget. Dans l'esprit du pacte girondin du Président de la République, nous avons créé, avec Bruno Le Maire, le Haut Conseil des finances publiques locales, pour échanger d'égal à égal entre l'État et les collectivités territoriales.
S'agissant du PLF, plusieurs thématiques sont ressorties de nos dialogues, notamment le logement, la justice fiscale ou la transition écologique. Nous sommes ouverts à vos propositions. Le texte que vous avez entre les mains est le texte initial, non final.