Le spread est très stable depuis un an, alors que les marchés savent que la clause dérogatoire générale sera levée en 2024. La situation est donc anticipée. Par ailleurs – je n'ai pas répondu tout à l'heure à la question sur les agences de notation –, il ne nous revient pas d'intégrer cet aspect dans nos perspectives.
Concernant le mécanisme de correction européen, la clause dérogatoire devrait être levée le 1er janvier 2024. La Commission européenne examinera alors l'éventualité de procédures pour déficit excessif contre certains pays. À cet égard, une prévision de croissance un peu élevée, des dépenses qui ne baissent pas, un déficit élevé et une prévision qui peut être jugée optimiste sont des éléments qui seront pris en considération par la Commission. Celle-ci, loin d'être stupide ou bornée, sait se montrer flexible – en cinq ans à la tête de ce portefeuille, j'ai réussi à ne sanctionner personne. En revanche, les tendances font partie de la discussion, en particulier la crédibilité de la trajectoire et la LPFP.
J'ai dit, par ailleurs, que les règles actuelles ne paraissent pas satisfaisantes et que je préférerais qu'elles soient réformées pour être plus intelligentes. Ce sera à l'Eurogroupe, à l'Ecofin (Conseil pour les affaires économiques et financières), voire au Conseil européen de le décider dans les semaines qui viennent.
Nous estimons que les prévisions de prélèvements obligatoires sont plausibles pour 2023 et plutôt favorables pour 2024, notamment du fait d'une hypothèse de croissance de l'activité optimiste et aussi d'hypothèses favorables sur le rendement de certains impôts. Ces facteurs font que nous estimons que la prévision de déficit est peut-être un peu optimiste.
Les questions de M. Lefèvre sont à adresser directement au Gouvernement, qui pourra détailler ses propres hypothèses.
L'objectif de dépenser mieux est-il atteint avec le PLF 2024 ? C'est une appréciation politique qui vous revient. En tout cas, on peut dépenser beaucoup mieux. Des progrès, il y en a : la fin du « quoi qu'il en coûte » annonce un changement de cap que nous appelions de nos vœux depuis longtemps ; de moindres dépenses de 16 milliards témoignent d'une volonté d'équilibre, même s'il s'agit davantage de retraits de dispositifs que d'économies structurelles.
Nous pensons toutefois que le plus difficile est devant nous. Après les 16 milliards en 2024, dont 3,5 de dépenses structurelles, il faudra trouver 12 milliards de façon pérenne pour les années suivantes. L'exercice sera un peu différent ! La revue des dépenses publiques devra aller beaucoup plus loin, en prenant en compte l'investissement et le fonctionnement de l'État, ainsi que ceux des collectivités locales et de la sécurité sociale. Elle devra être débattue de façon beaucoup plus ouverte et démocratique, avec le Parlement et peut-être des institutions comme la Cour des comptes. Surtout, elle devra être faite dans la durée et non pas réservée à la saison budgétaire : quand il s'agira de trouver 12 milliards d'euros pérennes par an, il faudra changer de braquet et de méthode.
Je conclus en vous souhaitant une discussion budgétaire passionnante et fructueuse, et je rappelle mon message : nous avons besoin d'une loi de programmation des finances publiques. J'espère que nous aurons été entendus.
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