Pour apprécier le niveau de conflictualité, il faut entendre les alertes. Au niveau national, ce sont la Défenseure des droits et le Contrôle général des lieux de privation de liberté. À l'international, ce sont les experts de l'Organisation des Nations unies. Il y a une remise en question du maintien de l'ordre comme on le pratique en France. Il y a des alertes sur les violences policières. Il y a une remise en cause profonde du schéma national du maintien de l'ordre. Nous sommes dans une situation de crise, avec une politique gouvernementale qui suscite des mouvements sociaux. Ils continuent à mobiliser et ils ne vont pas se calmer, compte tenu du contexte que traverse le pays.
Depuis 2017, nous constatons une multiplication des lois sécuritaires et un maintien de l'ordre très offensif reconnu source de tension, de violence et de brutalité. Ce qui est questionné, ici, c'est l'usage proportionné de la force. S'il existe une telle conflictualité, c'est aussi parce que le schéma ne correspond pas à la situation particulière de la contestation politique en France. Il y a un problème de respect de l'opposition politique. Que ce soit du fait des lois sécuritaires ou du schéma national du maintien de l'ordre, il n'est pas possible pour elle de s'exprimer de manière audible. La réponse est donc nécessairement la conflictualité.
La France devrait entendre les différents rapports, français ou internationaux, et s'inspirer d'autres modèles de maintien de l'ordre. L'Allemagne, par exemple, a pris une décision constitutionnelle imposant, à partir de 1985, que la police aille au contact et entame un dialogue pour permettre une stratégie de désescalade. Ce dispositif a largement inspiré d'autres pays européens. Lors des manifestations du 1er mai, en Allemagne, il y a des tirs de mortiers, des conflictualités au corps à corps et des violences très fortes. Pourtant, les forces de l'ordre pratiquent une politique de désescalade qui fonctionne et qui permet de faire baisser la tension de manière importante.
En France, la réponse actuelle est d'augmenter les dispositifs de répression, que ce soit par les techniques pratiquées ou les armes utilisées. Certaines grenades sont classifiées armes de guerre. Les GM2L, par exemple, doivent être tirées en cloche, mais une étude a malheureusement démontré que c'était insuffisamment le cas : elles provoquent donc trop de blessures. Que ce soit dans les méthodes, dans les outils, dans la politique ou dans la législation, la réponse à l'opposition politique est donc globalement répressive, indiscriminée et disproportionnée. Il faut écouter les alertes internes comme internationales pour remettre en question profondément ce choix de la répression.