Il n'est pas d'usage que le rapporteur intervienne juste après le président, mais plutôt après les auditionnés. Madame, Monsieur, je vous remercie de vous être présentés devant la commission d'enquête. Je voulais, pour la clarté de nos échanges, évoquer votre publication en date du 23 juin 2023, disponible sur votre site pour chacun de nos concitoyens qui seraient intéressés. Vous y assimilez la convocation devant cette commission à « une attaque sans précédent contre la liberté associative ». Vous voyez, je cite, « une tentative d'intimidation et de criminalisation » des mouvements sociaux et écologistes. Vous tracez un parallèle avec le retrait de l'agrément de l'association Anticor, sans indiquer qu'elle est la conséquence d'un jugement du tribunal administratif de Paris du 23 juin 2023 et qu'elle n'a évidemment aucun lien avec une commission d'enquête de l'Assemblée nationale, composée de députés. Vous indiquez par ailleurs que, je cite encore, Attac, Extinction Rebellion et Dernière Rénovation, cette dernière structure ayant été auditionnée il y a deux semaines, « sont désormais dans le viseur, étant associées de manière à peine voilée à l'organisation de "violences" lors des manifestations et rassemblements ». Vous terminez en affirmant que « le gouvernement semble déterminé à réprimer les manifestations écologistes ». Votre communiqué s'achève par une question : « Peut-on encore désobéir ? ».
Vous êtes ici à l'Assemblée nationale, devant des députés. Nous ne sommes pas le pouvoir exécutif. Votre convocation devant cette commission d'enquête est identique à celles adressées à un grand nombre d'acteurs professant des opinions et des analyses différentes. Il y a parmi eux des universitaires, des journalistes, des structures associatives, des membres du système politique. Nous nous déplacerons à Sainte-Soline avec les collègues qui le souhaitent. La semaine prochaine, nous rencontrerons les élus municipaux bordelais, que nous n'assimilerons pas à un groupuscule violent.
Contrairement à ce que prétend votre communication, nous ne tenons pas Attac pour un groupuscule violent. Il me semblait utile, en préambule de nos travaux, de le signaler, puisque j'imagine que vos écrits ont été lus, commentés, appréciés et interprétés. Vous êtes ici parce que vous avez un éclairage à apporter à nos travaux. Vous avez une expérience. Vous avez aussi une tonalité d'engagement. Le président a souligné, dans son propos introductif, que vous n'appeliez pas à la violence. Nous estimons intéressant de savoir comment vous appréhendez ces violences, comment vous considérez le climat politique autour des rassemblements et des manifestations, comment vous jugez l'action du gouvernement et de la majorité à laquelle j'appartiens, même si je suis ici rapporteur de la commission d'enquête dans sa pluralité. J'avais envie de vous poser ces questions et de vous demander si l'on pouvait encore désobéir. Mais à la lecture de votre communiqué, je m'interrogeais sur la possibilité de débattre sans travestir la réalité. Car vous travestissez la réalité dans cette communication.
Alors, je me demande si nous pouvons faire notre travail de députés, simplement en essayant de nous nourrir des appréciations des uns et des autres, des commentaires, des contradictions et parfois des conflits qui opposent les points de vue dans la société, dans l'hémicycle, dans cette commission et, de façon générale, dans notre pays.