Intervention de Mireille Clapot

Réunion du mardi 19 septembre 2023 à 15h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMireille Clapot, rapporteure pour les titres V et VI :

Le texte que nous examinons comporte de nombreuses avancées pour nos concitoyens. Je ne reviens pas sur les propos de mes collègues, mais je me réjouis de voir que nous prenons à bras-le-corps la protection des mineurs sur les réseaux sociaux, les escroqueries, la haine en ligne et la question de la désinformation qui mine nos sociétés. Permettez-moi de regretter que nous ne puissions élargir le champ de ces mesures aux messageries cryptées et privées, comme Telegram ou WhatsApp, et que nous ne puissions contraindre davantage les plateformes pour qu'elles aient un nombre minimal de modérateurs en langue française ou qu'elles participent financièrement à la sensibilisation du public aux dangers du numérique. Je voudrais aussi saluer les travaux de la Commission supérieure du numérique et des postes, où députés et sénateurs publient régulièrement des travaux, notamment sur la sécurité numérique, sur la souveraineté et sur la protection des mineurs. En tant que rapporteure des titres V et VI, j'ai analysé plus précisément les articles 16, 17 et 18.

L'article 17 est le seul concernant les collectivités, avec l'apport d'une interface numérique sur un sujet très sensible : les données relatives à la location des meublés de tourisme. Il prévoit la centralisation des données transmises par les plateformes aux communes, et viendra remplacer un système lourd et archaïque qui pénalise les services administratifs.

Vous connaissez l'engouement croissant des touristes pour des locations chez l'habitant et le succès des plateformes qui mettent en relation touristes et loueurs. La législation, en particulier la loi Elan, a donné des possibilités de régulation et de contrôle aux communes et des obligations aux plateformes et aux propriétaires. Celles qui ont choisi d'appliquer la réglementation du changement d'usage et un numéro d'enregistrement peuvent solliciter les intermédiaires de location pour obtenir des données sur les meublés loués sur leur territoire. Cependant, la transmission ne se fait qu'une fois par an, manuellement, par le biais de fichiers Excel, difficilement exploitables par les communes.

L'article 17 dispose qu'un organisme unique sera chargé de collecter les données auprès des plateformes et de les communiquer aux communes qui en font la demande. Environ 350 communes pourraient bénéficier de ce dispositif. C'est une réelle avancée, qui leur permettra de mieux contrôler le respect de la limite des 120 jours de location pour les résidences principales. Elles pourront désormais confronter les données en provenance de plusieurs intermédiaires de location et signaler aux plateformes les loueurs qui ne respectent pas la réglementation. Je vous proposerai plusieurs modifications de cet article, afin notamment d'ouvrir l'éventail des données et de les rendre accessibles, une fois agrégées.

Cet outil, qui a été expérimenté dans cinq communes, a rencontré un tel succès que l'on nous a proposé de l'élargir à beaucoup plus de communes voire à toutes les communes et à davantage de données, pour en faire un outil de pilotage de la politique du logement et du tourisme des communes. Dans la mesure où une législation européenne similaire est en cours d'élaboration, je pense prudent d'en rester à un cadre maîtrisé pour réussir l'extension de l'outil aux 350 communes concernées.

Les articles 16 et 18 portent plus précisément sur le Peren, le pôle d'expertise de la régulation numérique. L'article 16 élargit l'accès du Peren aux données publiquement accessibles des plateformes en ligne. Il qualifie également expressément le Peren pour que celui-ci puisse mener des recherches sur les risques systémiques menaçant l'Union européenne. Ces activités d'expérimentation et de recherche sont très précieuses pour soutenir les services qui doivent réguler les plateformes. Cette expertise en interne se nourrit des travaux de recherche et des expérimentations menés par le Peren : c'est pourquoi j'ai proposé d'élargir son champ de compétences aux éditeurs de contenus qui utilisent un système d'intelligence artificielle générative.

L'article 18 fixe quant à lui dans la loi les modalités de la collaboration entre le Peren et l'Arcom, cette dernière étant désignée par le texte comme coordinateur pour les services numériques en France. Si ces deux services collaborent déjà, il était nécessaire de prévoir une coopération spécifique. L'Arcom pourra ainsi plus facilement s'appuyer sur l'expertise technique du Peren pour mener à bien ses nouvelles missions.

Je conclus en soulignant à mon tour l'esprit constructif qui a prévalu dans nos travaux et je ne doute pas que l'intérêt général conduira nos futures discussions, en ayant toujours à l'esprit le respect des libertés fondamentales que vous avez rappelé, monsieur le ministre, et des normes européennes.

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