Je ne me suis jamais intéressée à la concurrence mais aux concurrents. Pendant quelques mois, j'ai eu le sentiment que cette ouverture fut stimulante. Hélas, rapidement, nous avons perdu des marchés, ce qui ne nous a pas fait plaisir. J'ai relu la stratégie nationale. Il y est indiqué que l'ouverture n'avait pas été bien préparée. C'est vrai. Peut-être pensions-nous que cela n'aboutirait pas. Malgré les paquets ferroviaires successifs, on ne parvenait pas à y croire. Finalement, les concurrents sont bel et bien arrivés, et ils étaient surprenants ! Ce fut un choc culturel de voir d'autres cheminots. C'était presque comme s'ils venaient d'une autre planète.
Certains des concurrents de l'entreprise historique ont mis en avant le caractère non coopératif des gestionnaires du réseau, peu enthousiastes à l'idée de voir circuler des trains venus d'ailleurs. Faute d'une bonne préparation, nous avons sans doute effectivement perdu des parts de marché : je ne me permets pas de juger mes prédécesseurs, d'autant que je n'ai occupé mes fonctions que durant deux années.
Au final, je ne sais pas quel a été le rôle de la concurrence. Théoriquement stimulante, elle l'a, en pratique, été un peu au début, mais n'a au bout du compte rien apporté. Si nous nous sommes tous mobilisés pour faire face au dumping, la concurrence sur les marchés routiers a, pour sa part, été très favorable aux transporteurs routiers étrangers.
Je reviens sur la question de l'intermodalité. Dans la mesure où il est rare que le trajet soit constitué uniquement d'un train circulant d'une cour d'usine à une autre, il faut très souvent passer par plusieurs modes – camion, train, camionnette, cyclologistique. Il en va de même pour l'export. Il existe une plurimodalité de fait : l'objectif est d'assurer la place la plus importante à la partie ferroviaire.
L'organisation de la multimodalité – plateformes, transport combiné – est porteuse d'avenir. Ainsi, SNCF Réseau investit dans des technologies – certains processus d'automatisation et de repérage des trains, d'alignement, à des fins d'augmentation de la vitesse, de facilitation et de réduction du bruit – visant à améliorer la productivité et la compétitivité. Il faut également prendre en considération la dimension immobilière : il faut des terrains disponibles afin d'accueillir des plateformes, des entrepôts et des endroits groupés de stockage pour les clients, de façon à les inciter à privilégier le train plutôt que la camionnette.