Ce n'est pas la libéralisation qui met en péril la viabilité d'une entreprise qui, en l'occurrence, connaissait déjà de grandes difficultés avant 2006. On ne peut pas à la fois s'opposer à l'ouverture à la concurrence et contester l'existence d'aides publiques, ou reprocher à l'État d'avoir libéralisé le secteur et de l'avoir aidé et de continuer à le faire. Nous ne nous sommes pas engagés dans une démarche ultralibérale : tous les gouvernements ont aidé ce secteur et, en particulier, un opérateur. Nous n'avons jamais abandonné Fret SNCF.
Je ne suis pas un fanatique de la concurrence systématique et débridée, surtout dans un secteur qui a besoin d'aides et de régulations publiques. S'il avait suffi de ne pas l'avoir ouvert à la concurrence pour que Fret SNCF ou tout autre opérateur public se porte bien, cela se saurait. Les pays européens dont la part modale ferroviaire est supérieure à la nôtre ont tous un système de fret plus libéral que le nôtre depuis plus longtemps. Tous les problèmes ne sont donc pas là. Si tel était le cas, nous reviendrions à la situation du début des années 2000 – mais la catastrophe était déjà là – ou nous « désobéirions ». Travaillons à des investissements soutenables, dans tous les sens du terme ! Les aides doivent se concentrer sur l'exploitation – un peu – et sur l'investissement – beaucoup.
Quelles sont les garanties à propos des repreneurs ? Nous avons commencé à la fin du mois de juillet et je vous dirai régulièrement ce qu'il en sera, de même que vous pourrez interroger les dirigeants de l'entreprise. Pour autant, si Fret SNCF continuait à vivre sa vie sans l'épée de Damoclès de la procédure, quelle garantie aurait-il que ses parts de marché demeureront chaque année ? Ses clients ne sont pas captifs ! Il convient de combattre le report modal inversé et de se battre pour conquérir des parts de marché et accroître l'attractivité de l'entreprise.
Je ne crois pas que la Commission européenne ait un plan caché anti-fret ferroviaire. Les règles de la concurrence existent. Elles n'empêchent pas les aides mais elles les cadrent et ont d'ailleurs été assouplies, ce qui nous permet de proposer un plan massif de soutien à l'investissement et à l'exploitation.
Je ne jouerai pas la montre, pas plus que je ne privilégierai la confrontation, car la situation est trop grave. Nous sommes face à une question d'efficacité et de protection écologique et sociale, de surcroît douloureuse pour les salariés. La meilleure réponse est une solution rapide visant à lever le risque. Les garanties qui sont sur la table sont sérieuses et solides, même si des efforts doivent être faits. Il serait certes plus facile de ne rien faire mais si tel était le cas, dans deux ou trois ans, vous m'accuseriez à juste titre d'avoir tué Fret SNCF. Je ne serai pas ce ministre : je serai celui qui a affronté une difficulté en investissant dans le fret ferroviaire et en apportant des garanties aux salariés du groupe, qui le méritent.