On nous explique que toutes nos objections seraient infondées parce qu'elles ne correspondent pas à la philosophie du texte. Mais on n'est pas au café philo, on est au Parlement ! On ne nous demande pas d'élaborer de grandes théories : on est là pour écrire un texte de loi qui va instaurer des règles, lesquelles vont organiser la vie des gens ! Si vous êtes là pour une discussion philosophique, certes très intéressante, vous ne devez pas vous occuper d'écrire la loi : vous devez faire autre chose ! Ce n'est pas grave, c'est très honorable aussi.
Vous nous demandez pourquoi les personnes dont nous parlons seraient inscrites à Pôle emploi alors qu'elles exercent soixante heures d'activité. Mais j'ai envie de vous retourner la question ! Vous nous avez dit que ce que vous ferez faire aux allocataires du RSA serait non du travail, mais de l'activité. Or qu'est-ce qui, dans le texte, nous indique qu'il n'y aura pas substitution de l'un à l'autre, et surtout qu'il n'y aura pas addition des deux ? Aujourd'hui, il y a des agriculteurs qui peuvent bosser à perte soixante heures par semaine – c'est possible, bien entendu –, et donc être au RSA en dépit de ces dizaines d'heures de travail. Il n'y a donc aucune espèce de contradiction entre le fait de travailler intensivement toute une semaine jusqu'à la nuit tombée, et le fait de toucher le RSA et donc de basculer dans votre dispositif, qui va attraper ces personnes et leur faire signer un contrat d'engagement. Ce faisant, vous leur imposerez un nombre d'heures dont on ne sait toujours pas à combien il s'élève – il sera supérieur à quinze et au-dessus de quinze, il y a tout de même beaucoup de chiffres possibles.
Bref, que vont-ils faire à Pôle emploi, ces gens-là ? Que vont-ils y faire ? Bien sûr, ils devront signer les quinze heures d'activité obligatoires. Quant à recevoir des offres d'emploi, nous avons regardé tout à l'heure : à Pôle emploi, il y a trois offres par département qui s'adressent à des agriculteurs. En plus de tout le reste, vous allez donc mettre en concurrence des gens qui bossent déjà à perte, pour des offres d'emploi qui n'existent pas ! Voilà qui résume l'ensemble de votre philosophie : rien ne fonctionne !