C'est en tout cas, pour le RSA, un revenu inférieur au seuil de pauvreté monétaire, qui décroche de plus en plus par rapport au Smic : 607 euros par mois au maximum, c'est trop peu pour maintenir légèrement la tête hors de l'eau, trop peu pour échapper à la très grande pauvreté, trop peu pour survivre dignement. Le RSA demande de remplir sept pages fastidieuses, et 30 % des allocataires potentiels n'y ont pas recours. Derrière ces sept pages se cache un contrôle déjà très présent : une absence à un rendez-vous ou un déménagement non signalé, et c'est la mise à l'amende, 50 %, 80 % voire 100 % du montant en moins, et la radiation au bout du chemin.
Ces sept pages traduisent votre philosophie de la sanction, celle que vous voulez renforcer et démultiplier ; c'est finalement celle du café du commerce, qui voit les pauvres comme des assistés ou des paresseux – le témoignage que j'ai cité en préambule y faisait référence. L'allocation n'est-elle pas, après tout, la réponse des lâches, comme le suggérait Christophe Castaner ? Peu importe l'inefficacité prouvée des sanctions, peu importe si les enfants trinquent parce que leurs parents auront été considérés comme défaillants, peu importe si les conjoints sont inscrits de force à Pôle emploi, même s'ils ont déjà un travail.
Ce texte partage la philosophie de celui que nous avons examiné il y a un an concernant l'assurance chômage : tout est fait pour créer un droit complexe, un droit illisible – qui ne peut donc avoir d'effet incitatif ou dissuasif –, une belle usine à gaz.