Ce livre intéressant mériterait que l'on s'y arrête longuement. Un de mes collègues vous a demandé si quelqu'un donne des ordres sur la manière de se procurer le matériel. Vous expliquez l'inverse : une considérable autonomie laissée à chaque membre qui décide tout à coup de se joindre au black bloc, terme dont vous expliquez qu'il décrit un mode opératoire. On n'est pas un black bloc : on fait partie du black bloc ponctuellement. Vous expliquez aussi que c'est la colère sociale qui alimente les troupes des black blocs et que, moins il y a de démocratie, plus les vecteurs classiques de l'expression républicaine sont abîmés, plus les violences policières sont visibles, plus augmente finalement le nombre de pratiquants de ce genre d'expression. Nous sommes dans l'objet même de la commission d'enquête, qui est de comprendre les mécanismes d'organisation des violences, et non des dégradations, perpétrées par les black blocs.
Vous expliquez aussi qu'il ne faut pas exclure la présence de militants d'extrême droite dans des black blocs. Peut-être pourrez-vous préciser dans quelle mesure des mouvements d'extrême droite, ou en tout cas des personnalités d'extrême droite, sont actives. Dans votre livre, vous prenez l'exemple des violences commises à l'Arc de Triomphe en 2018, rappelant que les auteurs étaient des militants d'extrême droite, notamment du Front national, des néo-fascistes qui ont été condamnés par la justice. Ils ne sont donc pas exempts du phénomène black bloc. Ils peuvent s'y mêler.
Un lien existe-t-il entre ce mode opératoire et des partis politiques ? Vous semblez dire que non, mais j'aimerais que vous précisiez votre opinion. Vous expliquez que beaucoup des participants au black bloc ne votent pas, sont dépolitisés et se tournent vers ce mode d'action parce qu'ils ne croient plus en la politique. Vous donnez l'exemple d'un jeune homme qui avait voté en faveur de François Hollande lors de l'élection présidentielle et qui, déçu de ce qui s'était passé ensuite, a considéré la violence comme seul moyen d'expression.