Il s'agit là d'une minorité de militants : les plus aguerris, les plus anciens et les plus politisés. Si le black bloc ou ces méthodes violentes et radicales étaient cantonnées à un petit milieu militant marginal d'extrême-gauche, cette commission d'enquête n'aurait pas été constituée. Mis à part les messageries cryptées, rien n'est très nouveau. Voyez les archives relatives aux manifestations des autonomes dans l'après-1968, celle des sidérurgistes le 23 mars 1979 ou celle du 21 juin 1973 contre un meeting du mouvement d'extrême droite Ordre nouveau. Elles sont d'une violence inouïe, incomparable à ce qui se passe maintenant. Leur organisation était incroyable. Ce que j'ai décrit n'est pas nouveau : des munitions sont cachées dans des poubelles et comme, la veille des manifestations, les poubelles de la rue sont parfois inspectées, on les dissimule dans des cages d'escalier. Cette technique est ancienne et, oui, des gens se préparent. Mais ce sont, à mon avis, les militants les plus aguerris. Les autres saisissent plutôt les opportunités : la plupart du temps, ce qu'ils décrivent comme le matériel offensif, c'est-à-dire ce qui sert de projectiles, se trouve sur le parcours lui-même. C'est d'autant plus simple qu'il y a énormément de chantiers en cours et que la grève des éboueurs a été une aubaine incroyable, si bien que la plupart du matériel a été recueilli sur place. Des burins peuvent être utilisés pour briser les pierres, mais ces techniques sont anciennes. Les militants d'extrême gauche révolutionnaire ont toujours recouru à ce genre de méthode pour déjouer la surveillance de la police. Après quoi, ils adaptent leur stratégie à la réponse de la police. Par exemple, dans les manifestations de mai 1968 et au tournant des années 1970, les gens n'avaient pas besoin de se masquer le visage puisqu'il y avait pas de vidéo-surveillance.