Ce qui m'intéresse, en tant que rapporteur, est aussi d'évaluer, sans idée préconçue, ce qui relève de l'incitation ou de la provocation à la violence. Comme tous mes collègues sans doute, je fais évidemment une différence entre, d'une part, une action comme l'entrave de la circulation sur une autoroute qui peut constituer une infraction pénale et que j'ai, je l'avoue, moi-même pratiquée jadis sur une route nationale en militant pour un ancien parti politique et, d'autre part, les violences aux personnes et la dégradation systématique de biens publics et privés. Toutefois, j'ai le sentiment que la frontière entre ce qui relève du militantisme ou de l'activisme et ce qui relève de la violence a tendance à se brouiller, à devenir plus floue.
Nous nous intéressons aux groupuscules violents, à ceux qui s'attaquent aux biens mais aussi aux personnes. Ce choix n'est pas le vôtre. J'entends souvent dire, y compris de la part de militants, que la violence reste le dernier mode d'action lorsque les voies judiciaire et électorale ont échoué. Est-ce un point de vue que vous partagez ? Vous considérez-vous plutôt comme des régulateurs de la violence avant qu'elle ne se commette ? Ou bien votre mode d'action est-il pris dans une succession d'événements pouvant aboutir à la violence ? J'insiste sur ce point parce que la frontière entre violence et action pacifique me semble floue et, parfois, instrumentalisée.