Votre question est un peu extérieure à mon travail. En effet, je n'évalue jamais la portée morale de l'acte.
Comment la société se pense-t-elle elle-même, dans ce qu'elle a de brutal d'abord et, ensuite, dans ce qu'elle pourrait devenir pour que des vies puissent s'accomplir sans recourir à la violence ? Il est urgent que la société, les forces de l'ordre, les activistes mènent ce travail de réflexion. C'est quand l'acte de penser fait défaut que l'on assiste aux manifestations les plus irrationnelles.
Il serait passionnant de lancer une enquête sur nos relations avec le monde. Elle révèlerait sans doute l'ampleur de nos inquiétudes. Elle nous aiderait à comprendre les attentes existentielles des individus. J'ai récemment travaillé sur la fatigue et le suicide, autrement dit la violence dirigée contre soi-même. Pour comprendre ces questions, il faut se demander ce qui explique un tel désaveu pour la vie, un tel refus du monde. Pourquoi est-il devenu aussi difficile pour un nombre croissant de personnes d'affronter le quotidien, de s'inscrire dans le monde ? Sait-on ce que les individus attendent pour s'accomplir dans l'existence qu'ils mènent ?
S'agissant de l'impact des groupuscules et de leur volonté d'imposer leurs vues, il faut d'abord saisir que ces mouvements existent, qu'ils suscitent l'approbation ou la désapprobation, et se demander ce que cet état de fait traduit. La violence peut briser les ordres. Mais elle ne crée rien.