La première question de fond est la suivante : comment organiser un dialogue apaisé et constructif entre les grandes et les petites entreprises ? Comment faire en sorte de pouvoir signer des accords ? Je pense que nous devons surmonter le constat selon lequel 88 % des patrons ne sont pas représentés lors des négociations. Dès lors, que pouvons-nous faire ? Si je défends le principe d'élections, c'est d'une part pour permettre de redresser cette inégalité fondamentale. Dès lors qu'un processus électoral serait mis en place, il serait impossible d'évincer les plus petites entreprises. Par ailleurs, cela aurait une vertu territoriale : dans le cas des régions ultramarines ou de la Corse, le patronat local aurait la possibilité de s'exprimer directement, sans devoir être tributaires d'organisations patronales nationales qui le représenteraient parfois « malgré lui ». Les élections permettraient donc à la fois de donner une voix à ceux qui ne sont pas représentés aujourd'hui et de permettre que les territoires puissent acquérir une capacité à s'exprimer. J'ignore ce qu'il en est des projets gouvernementaux à ce sujet.
Pour ce qui est des adhésions en cascade, elles s'expliquent par trois phénomènes. Tout d'abord, le patron d'une entreprise d'auto-école adhère une fédération susceptible d'avoir elle-même adhéré au Medef tant et si bien que le patron deviendrait adhérent au Medef sans le savoir, et dont la voix compterait par exemple dans le cadre des négociations pour les retraites. Le deuxième phénomène est lié au fait que dans de nombreux cas, la cotisation est payée par l'entreprise et non par son patron, ce qui fait que ce dernier, s'il a signé un mandat, peut ne pas savoir à quelle fédération son entreprise a adhéré. Le troisième phénomène est lié au fait qu'une entreprise en ayant racheté une autre peut être conduit à découvrir qu'il cotise à une fédération qu'il ne porterait pas dans son cœur. C'est sur ces trois leviers que nous devons agir pour pouvoir mettre fin à ces phénomènes d'adhésion involontaire.
Nous pouvons également envisager d'introduire des exigences de transparence supplémentaire, notamment pour ce qui est du comptage du nombre d'adhérents, de la connaissance par ces derniers des organisations auxquelles ils adhèrent, etc. Je rappelle d'ailleurs que les archives du Medef ne sont accessibles qu'au bout de quarante ans alors que le délai est de vingt-cinq ans pour des archives publiques. Ce régime d'exception ne contribue pas à comprendre certains débats politiques antérieurs.
Enfin, j'ai entendu une réaction au sujet des autoentrepreneurs. J'ai entendu qu'un autoentrepreneur ne serait pas un patron. Or un autoentrepreneur peut embaucher et dès lors c'est un patron. Sinon, cela signifierait qu'un patron qui n'emploierait pas de salarié pendant une certaine période serait exclu de cette catégorie. Ce n'est pas le cas et donc les autoentrepreneurs peuvent bien être considérés comme des patrons.
Quant à l'expression des intérêts, il s'agit ici de l'expression des patrons et pas nécessairement de ceux de leur entreprise. Une entreprise est un collectif humain dans lequel l'employeur occupe un rôle parmi d'autres.