Intervention de Hadrien Clouet

Réunion du mercredi 19 juillet 2023 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHadrien Clouet, rapporteur :

Comme mon collègue l'a souligné, notre diagnostic est assez largement partagé mais nos propositions sont un peu moins convergentes. Nous nous accordons quant à la difficulté à faire évoluer les règles de mesure de la représentativité alors qu'un nouveau cycle démarre et que la comptabilisation a pu d'ores et déjà s'ouvrir. La quasi-totalité des acteurs consultés nous a alertés sur le caractère inopportun du calendrier et nous sommes pleinement conscients des difficultés que celui-ci pourrait engendrer.

Cela étant, je pense que nous ne pouvons pas nous exonérer d'une réflexion plus vaste sur les règles de mesure de la représentativité patronale. Nous savons que la loi de 2016 répondait à l'objectif de pérenniser le poids respectif des trois organisations interprofessionnelles et de maintenir la position des sortants en édictant des critères de représentativité qui leur soient favorables, sans bousculer l'ordre préexistant. La première mesure d'audience, en 2017, a d'ailleurs parfaitement répondu à cette préoccupation puisque le Medef a conservé sa prédominance et que seul l'U2P a gagné quelques points supplémentaires de manière assez marginale. Ainsi, on a massivement fait œuvre de conservatisme en évinçant la vaste majorité des patrons qui ne sont pas représentés aujourd'hui. Dans ce contexte, de simples modifications des critères de représentativité ne me semblent pas pouvoir résoudre les difficultés majeures exposées ci-avant. Comment intégrer par exemple les autoentrepreneurs, qui sont une fraction du patronat injustement exclue de la mesure d'audience ? Comment vérifier que l'adhésion traduise bien un lien d'appartenance à l'organisation telle que voulu par l'employeur ? Comment s'assurer que chaque organisation dispose de suffisamment de mandataires pour pouvoir occuper les mandats auxquels elle prétend ?

Certes, je préconise que la direction générale du travail prenne un arrêté de méthode au moins huit mois avant la mesure d'audience pour harmoniser la récolte et les pratiques des vérifications des commissaires aux comptes, mais seule une remise en cause complète et radicale – au sens d'aller à la racine – du système actuel peut permettre de répondre à ces questions de fond.

A minima, l'acte d'adhésion me paraît devoir être davantage réglementé, avec une cotisation qui soit personnelle, plutôt que de faire payer l'adhésion sur les fonds de l'entreprise et donc par le travail des salariés. Cette adhésion préciserait les appartenances en cascade de la fédération à une autre et ainsi de suite, garantissant le consentement éclairé des patrons à leur adhésion.

Je pense surtout que nous pourrions envisager de mesurer la représentativité patronale par une élection démocratique, selon des modalités qui peuvent se discuter, soit « un patron égale une voix », soit différents collèges électoraux suivant les caractéristiques économiques des entreprises – en matière d'emploi notamment.

Pour rappel, la loi prévoyait, de 1947 à 1967, puis de 1983 à 1996, une élection patronale qui déterminait la répartition des 25 % de sièges à la sécurité sociale attribués aux organisations patronales. Je ne suis pas sans savoir que cette proposition a été écartée par plusieurs acteurs concernés au motif qu'une faible participation, déjà constatée aux élections consulaires – la modalité d'élection directe qui existe encore dans le monde patronal – affaiblirait le processus. Je reste toutefois convaincu qu'elle légitimerait davantage que le système actuel les représentants du patronat. Je pense par ailleurs qu'une faible participation électorale vaut mieux que l'éviction totale de la plupart des patrons qui ne sont pas représentés par les trois organisations dominantes. Pour le dire autrement, je préfère les 32 % de participation constatés en 1983 aux élections patronales que la présomption de représentation de 12 % seulement de patrons qui adhèrent à une organisation.

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