Intervention de Pierre Dharréville

Réunion du mercredi 19 juillet 2023 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Dharréville, rapporteur :

Je vous remercie tout d'abord pour vos propos sympathiques à l'égard de notre travail. Je constate que vous êtes assez largement opposés à ce type de démarche. C'est d'ailleurs ce qui avait conduit le bureau de la commission à proposer une mission « flash ». Nous devons envoyer un signal clair : nous ne souhaitons pas que des offres de ce type se développent. J'appelle même à ce qu'elles cessent purement et simplement. Il me semble que les conditions sont réunies pour que cet appel soit lancé.

Nous pouvons nous interroger quant à la finalité du développement de cette offre et nous perdre en conjectures. Des risques et des hypothèses ont été émis par certains d'entre vous, comme par exemple, comme on peut déjà le voir par ailleurs, le risque d'orienter la patientèle vers d'autres types de services. Ce risque existe aussi avec les centres de santé non programmés par exemple. Nous devons être très vigilants de ce point de vue-là.

Concernant la différenciation entre ce qui relève du conseil et de la consultation, il me semble effectivement que nous ne devons pas laisser de place à la confusion, et simultanément que le conseil fait partie du travail quotidien des médecins. En tout cas, pour ce type d'offre, une clarification de la nature de la proposition semble nécessaire.

Notre proposition vise aussi à doter la puissance publique de davantage d'outils face à ce type de démarches. Une nouvelle fois, nous ne remettons pas en cause l'action des PMI, qui a certainement besoin d'être encore développée sur certains territoires. Notre proposition n'est absolument pas antinomique, nous ne la voyons que comme un complément à l'existant.

Isabelle Valentin craignait un risque de privatisation de l'accès aux soins. Bien entendu, je souscris à ses propos. Quant aux mesures que nous pourrons prendre, le phénomène semble marginal et il semblerait dont peut-être exorbitant de prendre des mesures, mais si ce type d'offre venait à se multiplier, nous devrions examiner nos options en la matière.

Didier Martin évoquait le risque que le médecin ne soit remplacé par une intelligence artificielle. Cela fait écho à mon propos lorsque je rappelais que les êtres humains sont au centre des problématiques de soins. J'ai pour ma part évoqué un risque de surnumérisation de la réponse sanitaire. Nous avons vu dans d'autres domaines que le développement du numérique a pu perturber certaines réponses publiques. Cela mérite certainement une réflexion plus approfondie et je ne m'aventurerai donc pas plus loin aujourd'hui. Comment la téléconsultation peut-elle s'intégrer à l'écosystème de la réponse sanitaire ?

Notre collègue Paul-André Colombani a émis tout à l'heure une proposition consistant à moduler le taux de 20 % en fonction des spécialités. Nous pourrions effectivement approfondir ces questions mais nous devons aussi fixer des limites. Nous voyons bien les intérêts suscités par le télétravail en dehors du champ de la santé, mais aussi les risques qu'il représente. Nous pouvons aussi considérer les besoins de ressources médicales physiques. Certaines mesures ont été prises pour faire en sorte d'éviter une raréfaction de la ressource médicale en contact direct avec les patients, dont nul parmi nous ne remettra en cause la nécessité. Nous devons donc être très vigilants face au développement de ce type d'offre. Je pointais le développement de téléconsultations avec cabines. Nous aurons à nous pencher sur ce sujet lors de l'examen du prochain PLFSS afin notamment d'éviter les dérives de consumérisme et de marchandisation évoquées par certains d'entre vous, qui peuvent aussi être alimentées par ce type d'outils.

La puissance publique est également libre de considérer que ce type d'outils n'aurait pas vocation à être opérés par des acteurs à but lucratif. Je pense que ce type de question mérite d'être posé. Ne pourrions-nous pas faire un meilleur usage de certains outils de régulation ?

Bien entendu, dans la mesure où il s'agissait d'une mission « flash », nous nous sommes concentrés sur la question qui nous était posée, y compris dans nos conclusions, mais notre travail peut déboucher sur des réflexions beaucoup plus vastes.

Je terminerai en disant qu'à mon sens, nous devons être vigilants à l'égard de toute tentative de marchandisation de la santé. La marchandisation est déjà présente, cette offre nouvelle ne l'a pas introduite. La logique de financiarisation et de rentabilité est elle aussi bien présente. De même pour le risque d'ubérisation, y compris du travail et des métiers de la santé. Ce serait là un phénomène très préoccupant.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion