Vous avez évoqué des partis politiques qui incitent des groupuscules à agir. Je pense que certains d'entre eux n'ont mêmes pas besoin d'être activés. Ils agissent de leur propre chef. Ensuite, j'ignore si un parti politique digne de ce nom serait en mesure d'accepter ce qui s'est passé à Sainte-Soline. J'espère que ce n'est pas le cas. Peut-être suis-je naïf ? Cependant, sur le terrain, nous n'avons repéré aucun drapeau ou signe distinctif d'un parti politique lors de l'affrontement. Des partis auraient-ils incité des manifestants à passer à l'acte et à adopter des comportements violents ? Je ne peux pas vous répondre à ce sujet, que je ne connais pas suffisamment.
Ensuite, vous avez mentionné un dénigrement systématique de l'agriculture. Je le pense désormais complètement dépassé. Il porte ou portait sur l'agriculture conventionnelle. Mais lorsque de tels affrontements surviennent, on parle uniquement d'idéologie, qui vise la destruction pure et simple d'une agriculture qui cherche à évoluer. Selon moi, nous n'avions jamais connu un tel niveau de violence, qui a atteint ce jour-là un point de non-retour.
Les dégâts psychologiques que vous avez mentionnés sont réels. Mais il n'existe pas de sentiment de résignation. Si tel était le cas, cela signifierait que la violence l'a emporté. Nous continuerons ces projets parce que la loi les autorise. Or, nous sommes de culture légaliste. Nous respectons la loi. Je rappelle que le premier projet a été rejeté et que nous l'avons accepté : nous n'avions pas construit de réserve. Nous avons ensuite amélioré les techniques et nous nous sommes conformés à ce qui nous avait été demandé par l'État, la loi et les décrets. Nous sommes parvenus à un consensus satisfaisant le plus grand nombre, qui a conduit à démarrer des travaux qui continueront. Je le redis : la résignation n'est pas de mise car il s'agirait là du pire signal à envoyer. Nous ne pouvons nous y résoudre.
Les dégâts humains sont omniprésents. Des agriculteurs peuvent éprouver des difficultés à conduire leurs enfants à l'école le lundi matin, des enfants qui ont entendu leurs parents qualifiés de destructeurs de l'environnement et de la nature. De fait, comme nous le savons tous, la violence subie par les enfants peut être très prononcée et laisser des traces indélébiles.
S'agissant du mode opératoire, il existe une indéniable montée en puissance des phénomènes de violence. À l'occasion de ces manifestations, nous avons atteint les limites du droit, ce qui est fort dommageable. Il y a une vingtaine d'années, lorsque je me suis installé, des actions étaient conduites par des agriculteurs ou par leurs opposants, mais elles cessaient immédiatement lorsque les forces de l'ordre arrivaient. Aujourd'hui, l'affrontement n'est plus craint, ce qui implique un changement de paradigme.