Votre question est intéressante car elle montre bien que la concentration verticale est une plaie. Elle peut justifier que le législateur l'interdise, à plus forte raison dans un département insulaire. En effet, dans ce cas précis, l'éloignement devient une clef de voûte de la concentration.
Naturellement, ceci entraînerait une très vive réaction de la part de certains distributeurs, qui mobiliseraient des armées de juristes. Pour ma part, j'ai subi de très fortes pressions lorsque j'ai publié mon rapport. Ils essayeront vraisemblablement de solliciter immédiatement la Commission européenne, pour qu'elle vous déjuge. Mais si vous rédigez bien votre loi, cela n'arrivera pas. Dans le cadre de mes activités, je me rends à la Commission européenne quasiment deux fois par semaine. J'y discute fréquemment avec des experts du droit de la concurrence, qui m'ont dit que si une telle mesure était adoptée, un contentieux aurait certes lieu, mais vous le remporteriez, en démontrant qu'il s'agit là de la seule manière de créer les conditions de la libre concurrence, qui est un des principes fondamentaux des institutions européennes.
Mais M. Philippe Naillet a raison, vous devez vous y préparer. Pour ma part, je suis consterné que l'Europe laisse passer cet abandon de créance. Si j'étais concurrent de Run Market, j'irais immédiatement saisir les institutions européennes pour demander des comptes au gouvernement français, qui a abandonné 60 millions d'euros. On me rétorque qu'il en a été de même pour le transport aérien ; mais j'estime que les motifs ne sont pas identiques. Le gouvernement français peut être fondé à maintenir une compagnie aérienne à bout de souffle pour permettre aux gens de voyager. Or, on n'est pas dans ce cas.